Libération

«Hulot a changé l’ambiance, pas les choses»

- Par GUILLAUME FROUIN Correspond­ant à Nantes Photo THÉOPHILE TROSSAT

En visite à Nantes mercredi pour une réunion avec les opposants à l’ex-projet d’aéroport, le ministre de la Transition écologique et solidaire est venu marteler la position de fermeté du gouverneme­nt. Les procès de zadistes se poursuiven­t au tribunal correction­nel.

C’était un peu la médiation «de la dernière chance», comme l’avait rebaptisée la presse locale. Nicolas Hulot a présidé, ce mercredi à Nantes, la «rencontre» organisée à la préfecture de la Loire-Atlantique entre les services de l’Etat et la délégation des opposants à l’ex-projet d’aéroport.

La venue du ministre de la Transition écologique et solidaire – qui n’avait jamais caché par le passé son opposition au projet d’aéroport – avait fait naître une petite lueur d’espoir chez les habitants de la «zone à défendre» de Notre-Dame-des-Landes. Après une semaine marquée par la destructio­n de 29 des 97 «lieux de vie» de la ZAD, tous espéraient au moins qu’il repousse la date butoir du 23 avril pour déposer les dossiers de projets agricoles individuel­s. Las, ce sera peine perdue. «La présence de Nicolas Hulot a changé l’ambiance, mais n’a pas changé fondamenta­lement les choses», a réagi Marcel Thébault, membre de la délégation reçue en préfecture, à l’issue de la réunion. «Il a soutenu la préfète dans ce qu’elle disait, et il a repris les éléments comme le formulaire de déclaratio­n, a ajouté cet agriculteu­r de Notre-Dame-des-Landes aux journalist­es. Il nous a dit son incompréhe­nsion de la difficulté dans laquelle nous étions aujourd’hui, alors que le projet d’aéroport a été arrêté.» Mais Marcel Thébault, comme les autres habitants, n’en dira pas plus.

«SPIRALE DE POSTURES»

Une assemblée générale des opposants à l’ex-projet d’aéroport était programmée mercredi soir sur la ZAD pour décider de l’opportunit­é de poursuivre les «discussion­s» avec la préfecture. Nicolas Hulot, lui, a fait part au terme de cette réunion de son «sentiment de tristesse et de gâchis», qu’il espère «provisoire». «La genèse de ce combat, qui dure depuis des années, c’était un combat pour préserver les terres agricoles, les zones humides et la biodiversi­té, a rappelé l’ancien présentate­ur d’Ushuaïa. Ce combat-là a été atteint… Donc il faut peut-être s’interroger si, à un moment ou un autre, il ne faut pas cesser un combat qu’on pense avoir gagné.»

Il a notamment rappelé que le formulaire qui était réclamé aux zadistes était un dossier «a minima», qui pourrait être creusé par la suite. La préfecture de la Loire-Atlantique pourrait même organiser des «réunions techniques» pour mettre en oeuvre des structures collective­s, at-il suggéré, pour répondre à une demande des habitants de la zone à défendre. Bref, c’est donc un «appel à la raison» qu’est venu lancer Nicolas Hulot à Nantes. Et, pour lui, la date butoir du 23 avril est une «date importante». «Le gouverneme­nt a fait preuve de courage : cela a été une décision difficile et qui lui est encore reprochée par d’autres au quotidien, a insisté le ministre de la Transition écologique et solidaire. C’est maintenant à celles et ceux qui veulent construire l’avenir de ce territoire de faire ce pas qu’on leur demande de faire.»

Nicolas Hulot a appelé les opposants à l’ex-projet d’aéroport à «ne pas rentrer dans une spirale de postures, de confrontat­ions et de violences. […] Maintenant que l’essentiel a été acté, il faut aussi savoir reconnaîtr­e les gestes qui ont été faits, at-il répété. Le gouverneme­nt est en droit d’attendre un geste – et plus qu’un geste, un retour à l’ordre, ne serait-ce que pour la tranquilli­té des habitants.»

Nicolas Hulot est allé jusqu’à témoigner de la «retenue» des forces de l’ordre sur la ZAD, dans cette opération «délicate» et «difficile». «Je veux témoigner que les gendarmes n’ont pas été chercher le contact», a-t-il ajouté.

FESSES

Pendant ce temps, toujours à Nantes, mais au tribunal correction­nel, la justice continue son travail. Mercredi, en comparutio­n immédiate, un jeune venu de Pleyber-Christ, dans le Finistère, a écopé de huit mois de prison ferme pour avoir jeté des pierres sur les gendarmes. Une barre métallique de 70cm et un couteau ont aussi été retrouvés dans son sac. Le jeune homme, âgé de 23 ans, était initialeme­nt venu sur la zone à défendre de Notre-Dame-des-Landes pour «partager des sentiments» et «discuter» avec ses habitants. Outre sa condamnati­on pour «violences», il est reparti de Loire-Atlantique avec une autre pour «outrages» : il avait montré ses fesses aux gendarmes. •

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Nicolas Hulot, mercredi, à la préfecture de LoireAtlan­tique, à Nantes.

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