Macron chahuté dans les Vosges
«Cheminots en colère, on ne va pas se laisser faire.» En sortant de la mairie de Saint-Dié-des-Vosges mercredi, Emmanuel Macron comprend qu’en moins d’une heure, l’ambiance a basculé sur l’esplanade. Aux bravos et aux encouragements que lui avait adressés, à son arrivée, une petite foule bon enfant, ont succédé les sifflets et les cris de plusieurs dizaines de manifestants remontés. Contenus près de la gare par des cordons de CRS au début de la visite présidentielle, les membres de l’intersyndicale des cheminots lorrains ont finalement obtenu un droit de passage. Emmanuel Macron est avide d’«aller au contact». Quitte à reléguer au second plan l’objet initial de sa visite : la réhabilitation du centre-ville de la commune de 20 000 habitants, cible «emblématique» du plan «Action coeur de ville». Macron fond sur ses détracteurs. «Il ne faut pas être insultant, leur reproche-t-il d’entrée. Prenez votre part de la réforme, je prendrai ma part des investissements à faire dans la SNCF.» Des mots aussitôt couverts par le brouhaha. Interpellé par un cheminot, le chef de l’Etat s’immobilise. «La dette [de la SNCF], il faut la reprendre, on n’a plus de sous pour entretenir les voies, attaque un conducteur de train, encarté à la CGT, visage émacié et muscles longs. C’est ça qui fait que le sillon [créneau de passage, ndlr] est trop cher. Pas le statut des cheminots!» Macron se raidit : «Je vais être très clair. Cette réforme, on doit la faire.» Le cortège présidentiel s’ébranle à peine qu’un second groupe de mécontents, chauffé par l’attente, le prend à partie. Le chef de l’Etat perd patience: «Certains ici veulent seulement le désordre et la violence. A ceux-là, je n’ai rien à dire. Il faut cesser de prendre les gens en otage.» L’effet essence est immédiat. «Ne parlez pas d’otages, on n’est pas des terroristes !» crie un manifestant. Comprenant sa bévue, Macron baisse le ton : «Je vous respecte. J’ai ma part de vérité et vous avez la vôtre.»
NATHALIE RAULIN (à Saint-Dié-des-Vosges)