Sur le remaniement, LREM peine à s’assumer de droite
Voulant démontrer combien l’exécutif était serein, le porte-parole de gouvernement, Benjamin Griveaux, a livré mercredi un étrange argument : pourquoi parler de crise, alors que cela fait à peine dix petits jours que Gérard Collomb a quitté l’Intérieur ? N’a-t-il pas fallu à la solide Allemagne «150 jours pour former un gouvernement» ? Etrange comparaison. A l’automne 2017, après une victoire électorale étriquée, Angela Merkel avait rencontré les pires difficultés pour former une coalition gouvernementale, soutenue par une majorité cohérente. Emmanuel Macron, lui, dispose toujours, jusqu’à preuve du contraire, d’une écrasante majorité parlementaire.
A première vue, le parallèle de Griveaux semble donc absurde… sauf à considérer qu’il a commis là un lapsus très révélateur, reconnaissant que le Président était, comme la chancelière, empêtré dans une laborieuse logique de coalition. Tout indique, en effet, que le dosage gauche-droite est le grand sujet de ce remaniement. «Il faut respecter les équilibres de sensibilités», reconnaît d’ailleurs l’Elysée. Et cela n’a pas l’air d’être simple. Des indiscrétions des derniers jours – toutes manipulations mises à part –, il ressort que les ministrables issus du PS ont tendance à fermer la porte tandis que ceux du centre droit seraient, eux, tout à fait disposés à entrer. Le numéro 1 du PS, Olivier Faure, y voit une clarification salutaire. Le masque du macronisme serait tombé, les gens de gauche auraient enfin compris que leur «débauchage» au service d’une politique de droite n’était que pure «communication». Faure en veut pour preuve le refus de l’élu PS Mathieu Klein. Très engagé dans la lutte contre la pauvreté, ce dernier a indiqué vouloir poursuivre son mandat à la présidence du département de Meurthe-et-Moselle.
Rien de tel du côté des éventuelles recrues venues de l’autre côté de l’échiquier. Ni Jean Castex ni Frédéric Péchenard, élus locaux étiquetés LR et hauts fonctionnaires ayant servi sous Sarkozy, n’ont jugé utile de démentir la rumeur selon laquelle ils seraient «approchés». De quoi rendre nerveuse une partie de la macronie historique qui organise la résistance, à grand renfort de confidences dans les médias, contre la tentative de «putsch» d’un centre-droit décomplexé, guidé par Edouard Philippe et ses complices juppéistes. Le dernier baromètre Ifop Paris Match ne devrait pas les rassurer : nettement plus populaire que le Président (12 points d’avance), le Premier ministre progresse de 23 points auprès de l’électorat de droite. Jean-Pierre Raffarin a enfoncé le clou mercredi : il invite Macron à «sortir du tout En marche» pour entrer dans une «logique de coalition». •