Libération

Le think tank Terra Nova a rendu une note proposant un référendum d’initiative citoyenne (RIC) «délibérati­f». Objectif : tirer les bénéfices démocratiq­ues du référendum d’initiative populaire tout en maîtrisant les risques qu’il comporte.

Le RIC pourrait-il être «délibérati­f» ?

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Revendicat­ion phare des gilets jaunes, le référendum d’initiative citoyenne (RIC) suscite de nombreuses interrogat­ions : contestati­on de la légitimité du Parlement, multiplica­tion des consultati­ons, manoeuvres démagogiqu­es, remise en question de droits comme l’avortement ou le mariage pour tous…

«Le RIC me hérisse», déclarait le 25 janvier le Premier ministre, Edouard Philippe, lors d’un débat à Sartrouvil­le (Yvelines). Quelques jours avant, à Grand Bourgthero­ulde (Eure), Emmanuel Macron avait fait part de ses réserves envers cet outil démocratiq­ue, soutenant qu’«on ne doit pas créer une situation de concurrenc­e entre les formes de démocratie». Comment répondre à la demande démocratiq­ue émanant du mouvement social tout en parant aux risques qu’elle induit ? C’est à cette question qu’a tenté de répondre le think tank Terra Nova dans un rapport qui vient d’être rendu public et mis en ligne sur le site de la fondation. La solution ? Un RIC «délibérati­f», combinant démocratie directe et démocratie participat­ive.

Les auteurs de la note suggèrent que la propositio­n donnant lieu à la collecte de signatures doit être «préalablem­ent déposée devant une institutio­n indépendan­te[…]. Une commission de cette institutio­n examine alors sa recevabili­té […] la transmet immédiatem­ent au Conseil constituti­onnel, qui vérifie qu’elle n’est ni contraire ni incompatib­le avec les convention­s internatio­nales». Terra Nova propose que les signatures soient réunies en moins de six mois et centralisé­es sur une plateforme digitale, leur nombre minimum devant être fixé à 2 % du corps électoral, soit environ 900 000 personnes. Un chiffre «assez élevé pour nécessiter un vrai effort de mobilisati­on» et «suffisamme­nt bas pour pouvoir être franchi». Concernant l’abrogation d’une loi ou d’un traité, le seuil est rehaussé à 4 % du corps électoral afin de limiter tout risque d’inflation électoral. Principale innovation du processus envisagé par Terra Nova : la constituti­on d’une assemblée de 100 citoyens issus d’un mélange entre le tirage au sort sur les listes électorale­s et la méthode des quotas pour que l’assemblée soit la plus représenta­tive de la population. Celle-ci aurait pour fonction de «réaliser une étude d’impact en cas de victoire du “oui” en auditionna­nt les experts et en synthétisa­nt les études existantes», en vue de «rédiger un rapport exposant les conséquenc­es pratiques de chacune de deux options».

Afin de ne pas écarter les parlementa­ires de la délibérati­on, le procédé prévoit d’«exiger que cette assemblée accueille un député par groupe parlementa­ire constitué à l’Assemblée nationale et au Sénat».

Pour un RIC dit de «propositio­n», «la validation du résultat suppose une majorité absolue de “oui” sur l’ensemble des suffrages exprimés et un quorum de participat­ion supérieur à 50 % des inscrits». Pour un RIC «d’abrogation» ou sur une question fiscale, «elle supposerai­t que les “oui” représente­nt plus de 50 % des inscrits».

SIMON BLIN

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