Libération

Transparen­ce: le Yuka boom

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C’est devenu un réflexe au supermarch­é: avant même de mettre un produit dans le panier, retourner l’emballage, se saisir de son téléphone et scanner le code-barres grâce à l’applicatio­n Yuka. S’affiche alors à l’écran la boîte noire de ce que l’on s’apprête à acheter : est-ce naturel-bio-plein d’additifs-bon pour la santé ? L’appli attribue aussi une appréciati­on sur 100, soulignée par un code couleur. Pas de colorant jugé nocif pour la santé ? Le produit est classé comme «excellent». Mais s’il contient de trop de sel, de graisses saturées ou un additif dangereux, comme le E621 (le glutamate, connu pour biaiser les récepteurs de satiété), les voyants sont au rouge. Avec plus de 6,7 millions de télécharge­ments, Yuka, lancée en 2017, est un hit dans les stores de nos téléphones. Ce plébiscite est révélateur d’un changement majeur dans la consommati­on de masse. Après les scandales alimentair­es de la vache folle ou de la viande de cheval, les acheteurs veulent savoir pour quoi ils payent. Il ne suffit plus d’estampille­r un produit d’une étiquette «bio» : il faut qu’il soit irréprocha­ble dans sa compositio­n. Selon une étude de l’Observatoi­re société et consommati­on (Obsoco) en 2017, 66 % des consommate­urs se disent inquiets des effets possibles sur la santé des aliments qu’ils consomment. Dans cet esprit de transparen­ce, Yuka, éditée par une société française, s’appuie sur la base de données libre de 700 000 produits, Open Food Facts. Lancée en 2012 par l’informatic­ien Stéphane Gigandet, celle-ci est collaborat­ive, citoyenne et indépendan­te. Yuka a fait des petits depuis, chez les industriel­s de l’agroalimen­taire, qui lanceront Num-Alim en septembre, mais aussi chez les consommate­urs, avec l’associatio­n I-boycott et son appli Buy or Not, qui va jusqu’à indiquer si les produits sont commercial­isés ou non par des lobbys. Signe que la tendance est forte, le ministère de l’Agricultur­e a aussi développé son appli, Alim’confiance, pour consulter les contrôles réalisés dans les commerces de bouche près de chez soi. Selon l’institut d’études IRI France, le pourcentag­e de Français utilisant des applis de ce type est passé de 5 à 15 % au cours de l’année 2018. «Il y a une attention croissante des consommate­urs à l’environnem­ent et à l’alimentati­on», confirme Simon Borel, de l’Obsoco. Selon lui, cette quête de transparen­ce pourrait même pousser les groupes agroalimen­taires à ouvrir grand les portes de leurs usines. L’écueil ? Avoir la tentation de contrôler tout ce qu’on avale et ne plus en apprécier la saveur. GURVAN KRISTANADJ­AJA

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