Syndicats et patrons contre Macron
Les partenaires sociaux, ça commence à bien faire ? En tout cas, l’échec des négociations patronat-syndicats sur une (nouvelle) réforme de l’assurance chômage a bien agacé Emmanuel Macron. «On est dans un drôle de système ! Chaque jour dans le pays, on dit “corps intermédiaires, démocratie territoriale, démocratie sociale, laissez-nous faire”. Et quand on donne la main, on dit “mon bon monsieur, c’est dur, reprenez-la”», a lancé le chef de l’Etat jeudi devant les présidents de départements réunis à l’Elysée, avant d’enchaîner en donnant le beau rôle à l’exécutif. «Et le gouvernement va devoir la reprendre car on ne peut pas avoir un déficit cumulé sur le chômage comme on a depuis tant d’années.» De quoi faire bondir les grandes centrales. Pour leurs responsables, le cadre de départ, imposé, et les déclarations du Président et du Premier ministre pendant les périodes de négociations prouvent que l’exécutif ne voulait absolument pas d’un accord. Et qu’il souhaite en réalité appliquer ses mesures pour, d’un côté, durcir les conditions d’indemnisations et réaliser 3 à 3,9 milliards d’euros d’économies sur trois ans et, de l’autre, instaurer un bonus-malus sur les contrats courts pour réduire leur utilisation par les chefs d’entreprise. «Non, Monsieur le président de la République, on ne vient pas d’avoir “une vraie négociation sociale”, a dénoncé le nouveau patron de Force ouvrière, Yves Veyrier, dans un communiqué. La lettre de cadrage que votre gouvernement a imposée d’une part, et certaines de vos interventions publiques durant le déroulement de la négociation d’autre part, ne nous ont “pas donné la main” mais allaient à l’encontre [du] principe» fondamental de l’Organisation internationale du travail (OIT) prévoyant des négociations collectives «libres et volontaires».
«De quel “échec” parle-t-on ? s’est interrogée la CGT. De ne pas avoir accepté, pour les syndicats, pour une fois unanimes, de baisser les droits des chômeurs? Ou bien faut-il interroger la responsabilité d’avoir refusé côté patronal toute mesure contre la précarité ?» En «manipulateur» , le Président, poursuit la centrale, «a exigé une négociation impossible pour faire des économies sur le dos des chômeurs et, au passage, mettre la main sur la gestion de l’assurance chômage». Et, pour une fois, la CGT est d’accord avec… le Medef. Interviewé par le Monde jeudi, avant les déclarations de Macron, son président, Geoffroy Roux de Bézieux, a expliqué qu’«avec les ingérences de l’Etat, [il était] devenu quasiment impossible de négocier». Pour lui, «l’Etat a pris le contrôle de l’assurance chômage» .Si même le patron des patrons le dit…
LILIAN ALEMAGNA