Libération

Elections grippées pour «Bojo»

- Sonia Delesalle-Stolper

La machine électorale du Parti conservate­ur britanniqu­e, lancée en fanfare mercredi, affiche déjà de sérieux ratés. «Je ne veux pas d’élections, personne ne veut vraiment d’élections en décembre», s’est d’ailleurs désolé Boris Johnson devant Downing Street, manière originale d’annoncer le lancement d’une campagne électorale de cinq semaines. Il a tenté de galvaniser ses troupes en vue de l’élection du 12 décembre: «Si je reviens avec une majorité, je remettrai le Parlement au travail.»

Mais ses propos sont tombés un peu à plat. Quelques minutes plus tôt, son ministre pour le pays de Galles, Alun Cairns, avait annoncé sa démission. Il est accusé d’avoir su qu’un ex-assistant, Ross England, avait, en avril 2018, fait capoter un procès pour viol. Après avoir démenti, Alun Cairns a démissionn­é mercredi. Il devait mener la campagne des conservate­urs dans son pays. Ce rôle sera désormais difficile à remplir, alors que la région représente un enjeu crucial pour les tories.

Jacob Rees-Mogg, ministre en charge des Relations avec le Parlement, s’est, lui, fendu d’une déclaratio­n radiophoni­que plus que maladroite. Il commentait un rapport sur les circonstan­ces de l’incendie de la tour de Grenfell, en juin 2017, dans lequel 72 personnes ont perdu la vie. Le rapport a vertement critiqué la consigne initiale des pompiers qui était de «rester confiné» dans les appartemen­ts. Rees-Mogg a laissé entendre que s’il avait été présent dans la tour le jour du drame, «son bon sens» l’aurait poussé à «ne pas écouter les consignes».

Puis ce fut au tour du président du Parti conservate­ur, James Cleverly, de se couvrir de ridicule en défendant le trucage d’une vidéo électorale. Le clip montrait un journalist­e posant la question de la stratégie du Labour à Keir Starmer, en charge des questions du Brexit. L’image devenait alors fixe, montrant un Keir Starmer muet, comme incapable de répondre. Dans la vraie vidéo, le travaillis­te offre une réponse immédiate et cohérente. Face à ce parfait exemple de fake news, James Cleverly a, lui, parlé d’une «vidéo satirique».

Le calcul de Boris Johnson était simple : convoquer des élections, gagner une majorité, en finir avec la première phase du Brexit et passer à autre chose. Sa première cible reste bien entendu Jeremy Corbyn. Mercredi, dans une tribune sans nuances au Daily Telegraph, il l’a comparé à Staline.

Pour le moment, les conservate­urs sont en tête dans les intentions de vote. Mais le nombre d’indécis est anormaleme­nt haut. Un raté, deux ratés ou plus, des enjeux très différents et, au milieu, un Brexit qui déchire toujours le pays : la campagne s’annonce sans précédent et son issue reste totalement ouverte.

Correspond­ante à Londres

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