Libération

«Ça ne va pas du tout donner la même chose»

Thierry Clair, 53 ans, délégué syndical Unsa police, trente-trois ans d’ancienneté

- Recueilli par Ismaël Halissat

«Aujourd’hui, un policier peut prendre sa retraite à taux plein à 57 ans grâce à un système de bonificati­on qui permet de partir cinq ans plus tôt. Mais ce n’est pas non plus un cadeau parce qu’en échange on a une surcotisat­ion. Demain avec la réforme, on pourrait donc perdre ce statut spécial et devoir travailler jusqu’à 62 ans pour partir avec une pension complète. Mais à partir d’un certain âge, on n’a plus les mêmes réactions. Les années sont passées par là, avec tout le stress vécu, les montées d’adrénaline encaissées. A partir de 50 ans déjà, on n’a plus l’agilité et la forme physique qu’on pouvait avoir plus jeune. Sur des missions de voie publique, où l’on peut intervenir par exemple sur des rixes, des violences et des situations qui peuvent dégénérer d’un moment à l’autre, c’est franchemen­t impensable. Les horaires de nuit deviennent aussi de plus en plus compliqués à gérer. D’autant que dans des petits commissari­ats de province, ce sera très compliqué de cantonner tous les vieux policiers à du travail de bureau et à des horaires adaptés.

«Le montant de ma retraite pourrait aussi être diminué. Si je calcule le montant de ma pension sur les six derniers mois ou avec un système de points tout au long de ma carrière, ça ne va pas du tout donner la même chose. Mais c’est encore très flou sur ce point, on ne sait pas précisémen­t quel sera le nouveau mode de calcul. Si je prends mon cas personnel, je suis major, donc gradé. Avec le système actuel, je devrais partir avec une retraite maximum d’environ 2 300 euros à 57 ans. Mais avec la réforme, avec la perte de la bonificati­on, je pourrais perdre 200 à 300 euros en partant au même âge. La situation est encore pire pour la majorité des policiers qui sont gardiens de la paix et touchent aujourd’hui environ 1 900 euros. Ils pourraient également perdre une partie importante de leur retraite. On ne peut pas parler de reconnaiss­ance avec ces montants-là. Ça ne passera pas.»

Newspapers in French

Newspapers from France