Libération

«Ercolo Amante», le roi sommeille

Malgré les efforts déployés, l’oeuvre composée pour le mariage de Louis XIV assomme.

- Guillaume Tion

Gros temps mythologiq­ue à l’Opéra-Comique, où est présentée une oeuvre rare de Francesco Cavalli, Ercole Amante, créée pour le mariage de Louis XIV, rien que ça. La mise en scène de Valérie Lesort et Christian Hecq, remarqués pour un précédent Domino noir, aligne un festival de malices scéniques guidé par un esprit pop enfantin. Mais malgré l’intrusion de monstres sympatoche­s en latex, le livret distille un ennui de qualité supérieure que le second degré systématiq­ue de la mise en scène (jusqu’à son obsession

Ce vertige est exacerbé par l’écriture baroque de Genet. Ici, nous ne sommes pas en Afrique du Sud, et la scène, quasi vide, ne nous donne aucune indication spatiotemp­orelle. Ce qui attrape le regard, c’est l’immense mur du fond qui sert d’écran pour un film dont le générique de début nous dit qu’il est réalisé par Robyn Orlin. Sont cependant projetés des fragments de l’adaptation cinématogr­aphique de Christophe­r Miles en 1975, et l’oeil plonge directemen­t dans ces images en noir et blanc où s’incrustent les trois acteurs Andréas Goupil, de la littéralit­é, qui lui fait reproduire sur le plateau la moindre didascalie) ne parvient pas à occulter. Même en tentant de le torpiller, c’est la lourdeur du livret qui gagne, épuisant sur trois heures et demie de spectacle les efforts d’artistes méritants (qu’il s’agisse de Raphaël Pichon et son impeccable Ensemble Pygmalion dans la fosse ou du remarquabl­e plateau vocal). On en sort presque effrayé à l’idée de voir un jour ressortir des cartons un oratorio oublié de huit heures bricolé pour le baptême de Louis XV.

Ercole Amante m.s. Valérie Lesort et Christian Hecq dir.mus. Raphaël Pichon à l’Opéra-Comique (75002) jusqu’au 12 novembre.

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