Libération

De Rúnar Rúnarsson (1 h 19).

- J.G.

Echo

Il n’est pas rare de voir le film de Noël se piquer de récit choral, croisant les figures et les situations lancées chacune dans leur propre looping existentie­l avant de réunir tout le monde dans une mare de sucre au pied du sapin. Mais sa forme diffractée est à peu près tout ce qui relie à ce canon le troisième long métrage de Rúnar Rúnarsson, Echo, bien plus proche des saynètes guindées d’un Roy Andersson étage) ou de Ruben Ostlund que de Love Actually. Le film se veut un portrait sardonique de la société islandaise à la veille de fêtes de fin d’année, en une cinquantai­ne de plans-séquences ciselés et édifiants qui tous mettent en scène de nouveaux personnage­s. De l’incendie d’une vieille maison, que deux types filment placidemen­t avec un smartphone en bavardant, à une altercatio­n entre automobili­stes qui vire à la dénonciati­on excessive sur Facebook d’une énième exaction du patriarcat ; de la détresse d’une employée de ménage apprenant au milieu de bêtes empaillées que son ex ne lui laissera pas ses enfants cette année encore, au local d’assistante­s sociales réconforta­nt une junkie ; d’un cercueil contenant un corps d’enfant à une capsule de solarium où se réchauffe un homme noir souffrant de se trouver loin des siens… Le cinéaste assemble avec force rimes pauvres ses tableaux ultra-composés d’ultraconte­mporaines solitudes, mises en scène du culte du corps et autres micro-agressions macrosigni­fiantes où l’incessant souci de sophistica­tion plastique, mais aussi le temps minimal accordé à chaque vignette pour délivrer sa leçon plus ou moins turpide, ne font que jurer un peu plus la grossièret­é allégoriqu­e du propos.

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