Echange toit au village contre école locale
En leur proposant des logements à prix modestes, la commune d’Ascros, dans l’arrière-pays niçois, a fait venir des familles avec enfants. Une initiative parmi d’autres pour contrecarrer la fermeture des classes en zone rurale.
A Ascros, fin décembre, là où s’est installée la famille Jaeck après avoir vécu à Nice.
Ce jeudi de décembre dans la maison des Jaeck, c’est l’effervescence. Il n’est pas 8 heures et les trois enfants sont déjà tirés à quatre épingles. Estelle, Madison et Amadeo ont enfilé la même chemisette à carreaux rouge et noir. La boîte de chocolats pour la maîtresse est emballée et les chansons de Noël connues sur le bout des doigts. Ce soir, c’est le spectacle de fin d’année de l’école d’Ascros pour les petits de 3, 5 et 6 ans. Une fête qui a failli ne pas avoir lieu dans ce petit village de l’arrière-pays niçois. Sans la fratrie Jaeck, l’école aurait dû fermer à la rentrée 2019. Mais d’autres établissements n’échappent pas à ce triste sort : cette année en France, 63 écoles en zone rurale ont fermé «dans un contexte de baisse démographique persistant dans les territoires les plus éloignés», indique l’Education nationale. Pour faire revenir les enfants et continuer d’entendre leurs cris dans la cour d’école, des maires regorgent d’imagination et de pugnacité. «L’école était dans le collimateur de l’inspection académique, raconte le maire d’Ascros, Vincent Giobergia. On était prévenus : le chiffre magique pour rester ouvert à la rentrée 2019, c’était douze. On était onze.» Alors l’élu LR propose trois logements communaux à la location : deux appartements de trois pièces à 200 euros par mois et un deux pièces à 150 euros. Des prix imbattables dans les Alpes-Maritimes. Objectif : attirer des parents et leurs enfants. «Avoir de jeunes actifs stabilise une population, explique le maire. Ça maintient un lien très fort entre toutes les générations.»
Grâce à ce dispositif, trois familles se sont installées et cinq nouveaux enfants ont fait leur rentrée à l’école en septembre. «On compte 18 élèves. Pour le moment, on n’est plus menacés, dit Vincent Giobergia. Mais un village, c’est un feu. Tout pôle d’activité est une petite flamme qu’il faut entretenir: l’école, le commerce, l’artisanat. Dès qu’on en éteint une, il faut rallumer les autres. Dès qu’une se dynamise, c’est un coup de chalumeau sur les autres.» L’école est le lance-flammes d’Ascros. A plus de 1 000 mètres d’altitude, au bout d’une route tortueuse à 60 km de Nice, ses 160 habitants peuvent aussi bénéficier de cours de sport pour les seniors, de deux restaurants et d’une épicerie en reprise.