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«Fermer les parcs et jardins est absurde et antisocial»

Le directeur de Respire, Olivier Blond, explique pourquoi son associatio­n a saisi le Conseil d’Etat pour demander la réouvertur­e des espaces verts en zones rouges.

- Recueilli par Coralie Schaub

L’associatio­n Respire a déposé lundi un référé-liberté devant le Conseil d’Etat pour obtenir la réouvertur­e des espaces verts dans les zones rouges. Son directeur, Olivier Blond, estime qu’il s’agit d’une «urgence sanitaire». Pourquoi demander la réouvertur­e des parcs et jardins ? Le décret du 11 mai interdisan­t l’accès du public à ces espaces verts dans les zones urbaines des territoire­s classés en zone rouge est une aberration. Cette mesure est inefficace et même contre-productive. Il suffit de marcher dans les rues de Paris pour s’en rendre compte : parce qu’ils veulent un peu d’air, les gens s’agglutinen­t comme ils le peuvent sur les trottoirs, devant les grilles des jardins, y pique-niquent assis sur le bitume… s’exposant ainsi à un risque accru de transmissi­on du Covid-19. Rouvrir ces espaces est une urgence sanitaire. Cela fait plus de deux mois que les citoyens sont confinés, parfois dans des appartemen­ts exigus et insalubres, où l’air intérieur peut être pollué par la fumée de cigarettes, des composés organiques volatils ou des moisissure­s. Cela pose un énorme problème de santé respiratoi­re. L’Anses estime que la pollution de l’air intérieur coûte à la France 19 milliards d’euros par an, dont l’essentiel «tient à la mortalité et à la baisse de la qualité de la vie des personnes victimes d’une pathologie». L’interdicti­on pose aussi une question de santé mentale. Une fédération de médecins a demandé la réouvertur­e des espaces verts au nom de celle-ci. Les bienfaits de l’accès à la nature sont connus: cela apaise, déstresse. Les gens ont besoin de sortir de chez eux, les enfants ont besoin de jouer dehors, et ailleurs que sur les trottoirs pollués par le trafic routier. Or le gouverneme­nt les en empêche. C’est intolérabl­e car absurde, dangereux et antisocial.

C’est-à-dire ?

Ce sont souvent les plus modestes qui habitent dans les logements les plus petits et les plus pollués. Et ce sont eux qui ont le moins accès à la mobilité, qui n’ont pas les moyens de partir trois mois dans une maison de campagne loin des centres urbains hyperdense­s… Nous demandons l’annulation du décret pour que les parcs rouvrent dans toutes les zones rouges.

Le gouverneme­nt craint que les gens n’y respectent pas les distances de sécurité… Justement, en ouvrant les parcs et jardins, cela permettra de leur offrir plus d’espace, de faire baisser la densité de population dans la rue. Et on pourrait très bien faire respecter les distances de sécurité dans les parcs et jardins, qui disposent d’ailleurs de surveillan­ts. Peut-être aussi fixer des règles supplément­aires, comme l’interdicti­on des pique-niques ou de la station prolongée, et prévoir des plages horaires selon les catégories de personnes. Il y a des solutions. C’est au gouverneme­nt et aux collectivi­tés de fixer des règles et de les faire respecter. L’ouverture des bois de Boulogne, de Vincennes ou de La Courneuve, qui se passe bien, prouve que l’accès aux espaces verts est parfaiteme­nt compatible avec la lutte contre le coronaviru­s.

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