«Puzzlewood», nouveau manège en synthés de Plone
Découvert il y a vingt ans, le groupe de Birmingham revient par surprise avec un réjouissant écrin de vignettes instrumentales rétrofuturistes.
Septembre 1999, le XXe siècle vit ses derniers feux lorsque débarque For Beginner Piano, premier album du trio Plone qui conjugue le futur proche au passé recomposé, rembobinant l’histoire joyeuse des musiques électroniques préhistoriques en un composite irrésistiblement charmant. Leurs bibelots sonores évoquent tour à tour les sinusoïdales extraterrestres de thérémine, les travaux pratiques et ludiques du BBC Radiophonic
Workshop et les cabrioles sonores des laborantins maboules d’une internationale du
Moog, du Wurlitzer et des oscillateurs en folie, qui va du Canadien Bruce Haack au Français JeanJacques Perrey, alors tout juste ressorti du formol par Air.
Plone appartient à cette microscène rétrofuturiste de Birmingham (Pram, Broadcast) et cet album hébergé chez Warp va au fil du temps devenir une sorte de modèle insurpassable du genre, ses mélodies nostalgiques mais piquantes et stimulantes égalant parfois les plus belles plages d’Ennio Morricone ou de François de Roubaix. Un deuxième album avorté (mais échangeable sous le manteau) et la dispersion de ses membres (chez Broadcast, Seefeel ou Mike in Mono) ne laissait espérer aucune résurrection, jusqu’à l’annonce miracle de ce Puzzlewood par le label Ghost Box, et c’est comme si Noël tombait au printemps. L’un des trois larrons, Mark Cancellara, a quitté les claviers pour devenir assistant d’un magicien, mais Billy Bainbridge et Michael Johnston n’ont pas non plus perdu leurs pouvoirs d’illusionnistes. Reprenant leurs jeux de miroirs, de mécanos et de culbutos analogiques comme s’ils les avaient laissés la veille, ils repartent pour une nouvelle symphonie des jouets, ce «puzzle en bois» étant assurément constitué de pièces en trompe-l’oeil et de matières variées et élastiques, ponctués par des voix en virgules et exclamations burlesques. Alternant les torpilles pop (Miniature Magic), les aubades exotica en Formica (The Model Village) et les siestes rêveuses avec chants d’oiseaux (Red Kite), ils s’offrent même une petite virée disco aux guitares Chic (Day Trip) comme pour reprendre à Daft Punk ce que les robots, à l’évidence, leur ont emprunté. On pouvait redouter de revoir sortir des Zébulons de leurs boîtes, comme on n’ose revoir les dessins animés de l’enfance de peur d’en érafler le souvenir émerveillé, et pourtant leur manège enchante toujours autant. Ames insensibles s’abstenir.
PLONE
PUZZLEWOOD (Ghost Box).