Libération

Ségur de la santé : vraie réforme ou opération de com ?

- éric Favereau

«Les grands-messes à Ségur ? On connaît, ironise le Dr Jacques Battistoni, qui préside MG France, premier syndicat de médecins généralist­es. Avec Marisol Touraine [ministre de la santé du gouverneme­nt Hollande, ndlr], il y en avait au moins une par an. Cette fois-ci, on s’interroge. C’est une opération de com, mais n’est-ce qu’une opération de com ?»

Le Ségur de la santé, du nom de l’avenue où est logé le ministère, vient de vivre une première semaine incertaine, confuse, peu novatrice. Revenons d’abord sur le fonctionne­ment de ce drôle d’objet. Au sein du comité Ségur national, 80 personnes, qui représente­nt quarante organisati­ons ou structures, sont regroupées en visioconfé­rence. Il y a de tout, des syndicalis­tes, beaucoup de médecins, des représenta­nts de structures médico-sociales, et des absents de marque, à commencer par le collectif Inter-Urgences, pourtant à l’origine du mouvement de grève lancé il y a près de deux ans. «C’est incompréhe­nsible et décevant», nous dit Hugo Huon, infirmier qui fut leur porte-parole. Autre absence notable, celle des infirmière­s, en très petit nombre, et des représenta­nts des malades. «Les malades chroniques, c’est 20 millions de personnes. On n’est quasiment pas représenté­s, alors que si on nous avait écoutés pendant la crise, les choses auraient peut-être été moins difficiles», dit Marie Citrini, représenta­nte des usagers de l’hôpital Saint-Antoine, à Paris. Comment tout ce petit monde va-t-il travailler ensemble ? C’est l’inconnu. Il y a des groupes de travail aux intitulés très administra­tifs, avec quatre grands piliers : «Transforme­r les métiers et revalorise­r ceux qui soignent», «Définir une nouvelle politique d’investisse­ment et de financemen­t au service des soins», «Simplifier radicaleme­nt les organisati­ons et le quotidien des équipes» et «Fédérer les acteurs de la santé dans les territoire­s au service des usagers». Avec, en haut, un comité national et, en parallèle, un groupe spécial sur les carrières et les rémunérati­ons.

Pour faire tourner cette architectu­re délicate, l’ancienne secrétaire générale de la CFDT Nicole Notat sera épaulée par trois inspecteur­s généraux des affaires sociales aux profils extrêmemen­t classiques. «Sur la méthode de travail, on ne sait rien, j’attends un calendrier», constate le Dr Battistoni. «C’est le flou, on ignore qui participe au groupe de travail, on sait juste qu’il y a un comité de pilotage qui se réunira tous les jeudis», lâche la Dre Anne Gervais, du collectif Inter-Hôpitaux.

Clairement, le gouverneme­nt n’a donc pas choisi de débat public, ni même de faire fonctionne­r de façon transparen­te une démocratie sanitaire. «Ce n’était pas vraiment possible vu l’objectif de faire vite», concède-t-on au ministère de la Santé. Si on laisse de côté la question des rémunérati­ons, les dossiers chauds sont archiconnu­s.

«Le risque, c’est qu’ils veulent du consensus. Or, pour avancer, il ne faut pas avoir peur des divergence­s», s’inquiète le Pr André Grimaldi, coordonnat­eur du «manifeste des soignants».

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Albert Facelly Le ministre de la Santé, Olivier Véran.

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