Injustice permanente
Le racisme comme argument électoral, la répression comme mantra politique. Il n’y a pas d’autre moyen de qualifier l’attitude de Donald Trump envers le mouvement de protestation déclenché par la mort de George Floyd, étouffé sous le genou d’un policier de Minneapolis. Le Président condamne les violences et les pillages, ce qui est évidemment son rôle, comme le fait d’ailleurs son adversaire démocrate Joe Biden. Mais il le fait en citant la sinistre formule d’un ancien chef de la police de Miami, raciste avéré : «When the lotting starts, the shooting starts», qui annonçait ainsi que ses hommes tireraient à vue sur les émeutiers. Et Trump d’ajouter aussitôt qu’il demanderait le classement des «antifa» américains dans la catégorie des organisations terroristes. Alors qu’à côté de ces débordements, la plus grande partie des contestataires manifestent de manière pacifique, indignés par cet énième dérapage tragique perpétré par un policier blanc contre un Afro-Américain, qui n’avait de surcroît commis aucun délit et encore moins un acte de violence. Ainsi va la vie politique aux Etats-Unis, où un président, pour consolider sa base électorale principalement blanche, nie l’évidence, c’est-à-dire la persistance décourageante d’un «racisme systémique» dans la société américaine, pour accuser sans preuves l’action de petits groupes antiracistes dont rien ne dit qu’ils ont des responsabilités dans les émeutes. Lesquelles sont surtout alimentées par l’injustice permanente dont sont victimes les Afro-Américains, qu’il s’agisse de santé avec le Covid, de logement, d’emploi, de politique urbaine ou de maintien de l’ordre. Obama, sans grand succès, il faut bien le dire, s’était efforcé de faire la pédagogie de l’antiracisme. Trump, obnubilé par ses difficultés avec l’opinion pour sa gestion calamiteuse de la pandémie, s’est lancé, franchement et sans détours, dans la pédagogie du racisme. •