Haine en ligne : l’impunité au coeur du mal
Face à la forte augmentation du phénomène, qui s’est accélérée avec le confinement, l’exécutif entend réagir. Non sans alimenter le débat sur la liberté d’expression.
Des flots de messages injurieux sur les réseaux sociaux, des menaces, des montages photo humiliants, de la diffamation ou de l’usurpation d’identité en ligne : le cyberharcèlement augmente de manière exponentielle et s’est accru pendant le confinement. Selon une étude publiée le 5 novembre par l’association e-Enfance, un adolescent sur dix déclare en avoir été victime. Remis au centre des débats par l’assassinat de Samuel Paty, pris pour cible suite à une vague de haine en ligne, le cyberharcèlement faisait vendredi encore l’objet d’une discussion au Sénat. Le gouvernement entend mettre en oeuvre rapidement des mesures législatives pour lutter contre ce phénomène. Lundi matin, le procureur de la République de Paris, Rémy Heitz, a notamment annoncé sur RTL la création d’un pôle spécialisé au parquet de Paris pour assurer une réponse juridique «rapide, visible, efficace» contre la haine en ligne. L’objectif : «Faire reculer le sentiment d’impunité» lié aux délais de procédure. «Nous voulons nous renforcer car il peut y avoir des passages à l’acte», a affirmé le procureur qui entend faire retirer rapidement «les contenus les plus dangereux». «L’idée est de créer un Pharos judiciaire», a expliqué le procureur, à l’image de la plateforme du ministère de l’Intérieur où les internautes peuvent signaler des contenus illicites.
«Anonymat». Alors que 80 enquêtes sont déjà menées face à cette menace, le garde des Sceaux a promis son soutien au parquet, qui demande des moyens supplémentaires. Composé de juristes et de spécialistes d’Internet, ce pôle travaillerait en lien étroit avec les fournisseurs de réseau pour «identifier les auteurs compte tenu de l’anonymat» mais aussi avec les représentants des plateformes comme Facebook ou Twitter. La modération insuffisante des géants du Web et leurs algorithmes, qui favorisent la viralité des contenus haineux, sont souvent pointés du doigt. Le secrétaire d’Etat chargé du Numérique, Cédric O, avait d’ailleurs estimé vendredi, au Sénat, que la chaîne judiciaire et la «peur du gendarme» étaient «le coeur du sujet». Eric Dupond-Moretti a soumis le 18 novembre au Conseil d’Etat une proposition pour accélérer les procédures judiciaires au sujet de contenus illégaux. Il entend changer le code de procédure pénale pour que toute personne non journaliste puisse être convoquée en comparution immédiate pour avoir diffusé de la haine publiquement, notamment sur les réseaux sociaux.
«Raids». Si elle permet de ne pas toucher à la loi de 1881 sur la liberté de la presse, cette proposition relance le débat glissant sur qui est journaliste et qui ne l’est pas. L’enjeu, plutôt que de créer de nouvelles lois, «c’est surtout le problème des moyens attribués aux services d’enquête», estime Vincent Lanier, premier secrétaire général du Syndicat national des journalistes (SNJ), regrettant que la plateforme Pharos soit «saturée».
Le SNJ s’est porté partie civile au procès, ce mardi, d’un des harceleurs de la journaliste victime de cyberharcèlement Julie Hainaut (lire cicontre). Si une loi a complété en 2018 le délit de harcèlement pour mieux punir les «raids numériques» –tous les participants d’une vague de messages haineux peuvent être inquiétés, même si cela ne concerne qu’un seul tweet – très peu de condamnations ont été prononcées. «Créer un parquet spécialisé pourrait permettre un meilleur traitement du cyberharcèlement par les policiers et une réponse pénale plus réactive, espère Paul Coppin, responsable juridique de Reporters sans frontières, partie civile au procès. Menacer un journaliste revient à le censurer et à restreindre la liberté d’informer», souligne-t-il.
Plusieurs centaines d’exilés errent dans le nord de la capitale après l’évacuation du camp de Saint-Denis. Ian Brossat, adjoint à la maire de Paris, propose de mettre à disposition le Parc des expositions de la Porte de Versailles et l’espace Champerret.
A Grand-Couronne, en Seine-Maritime, les salariés font pression pour faire perdurer le site de ChapelleDarblay, spécialisé dans le recyclage du papier. Si aucun repreneur n’est trouvé d’ici à 2021, l’usine presque centenaire, qui subit la chute des ventes de journaux, sera démantelée.