Air France : la justice saisie pour fraude au chômage partiel
Les ennuis volent en escadrille pour Hop, la filiale d’Air France spécialisée dans les liaisons courte distance. L’entreprise a engagé, depuis près d’un an, un plan de restructuration visant à supprimer 1 020 postes pour un effectif de 2 600 salariés. Or ces réductions sont contestées par le ministère du Travail. Les conditions de reclassement de salariés licenciés au sein de la maison mère, Air France, ne sont pas jugées suffisantes. En outre, selon les informations obtenues par Libération, une procédure pénale va être engagée contre Hop par l’inspection du travail pour fraude aux allocations au chômage partiel. Le parquet du tribunal judiciaire de Nantes va être saisi de l’affaire dans les prochains jours.
Le litige porte sur la rémunération des pilotes de Hop, placés l’an dernier en activité partielle compte tenu de l’effondrement du trafic aérien du fait de la crise sanitaire. Pourtant, certains travaillent toujours à un rythme soutenu. «Comme nous avons de petits avions, dont les coûts sont moins élevés, nous nous sommes substitués à pas mal de vols habituellement effectués par Air France avec de plus gros appareils, mais qu’il n’est pas rentable de faire voler avec peu de passagers», confie un pilote. Or à partir d’un certain seuil –67 heures de vol par mois– les pilotes de Hop sont rémunérés selon un système d’heures supplémentaires majorées. L’inspection du travail a donc pointé l’illégalité qui consiste pour la filiale d’Air France à percevoir des aides de l’Etat au titre de l’activité partielle et en même temps de rémunérer certains de ses pilotes en heures supplémentaires.
«La direction a pourtant été alertée de l’existence de ce problème, mais elle a joué la politique de l’autruche», estime sous couvert d’anonymat ce même commandant de bord. Lorsque le procureur de la République de Nantes sera saisi, il aura la possibilité d’ouvrir une enquête préliminaire et de confier une enquête à un service de police pour faire la lumière sur ce système, ou bien il pourra décider de classer l’affaire.
Sollicitées par Libé, ni la direction de la filiale Hop ni celle d’Air France n’ont souhaité réagir. Pourtant, la question du mode de rémunération des pilotes risque aussi d’être posée par l’inspection du travail dans deux autres entités du groupe Air France-KLM : la filiale Transavia, spécialisée dans les vols à bas coûts, et Air France auraient-elles mis en place des systèmes de rémunération similaires, dans lesquels chômage partiel et heures supplémentaires majorées coexistent ? La question agite les services concernés du ministère du Travail.
D’autant qu’Air France, dont l’Etat est actionnaire à 15 %, fait partie des entreprises les plus massivement soutenues depuis le début de la pandémie: la compagnie en grande difficulté a reçu 3 milliards d’euros d’aide directe de l’Etat et un prêt garanti de 4 milliards. Dans les toutes prochaines semaines, le gouvernement va aussi recapitaliser Air France à hauteur de 3 milliards d’euros, afin d’effacer en grande partie l’ardoise de ce prêt.
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