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Langues régionales : contre-attaque de députés pro-Blanquer

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De parole de députés, la manoeuvre est «inédite». «Nouvelle», se gausse une parlementa­ire LREM, fustigeant «l’inculture institutio­nnelle» de certains de ses collègues. La saisine des «sages» du Conseil constituti­onnel, jeudi, par une soixantain­e de députés, prend des allures de match retour imposé sur le sujet sensible des langues régionales. Le match aller a eu lieu le 8 avril quand la propositio­n de loi pour la «protection et la promotion des langues régionales», portée par le député du Morbihan Paul Molac, est adoptée à une large majorité par l’Assemblée. «Historique», se réjouit alors l’élu breton, entonnant avec ses collègues le Bro gozh ma zadoù («vieux pays de mes ancêtres») sur les marches du Palais-Bourbon. Côté gouverneme­nt, le vote a valeur de camouflet. Plus encore pour le ministre de l’Education, Jean-Michel Blanquer, opposé à l’une des dispositio­ns phares du texte : celle autorisant l’enseigneme­nt immersif en langue régionale dans les établissem­ents publics, jusqu’alors uniquement admis dans les structures privées. Par respect pour l’indépendan­ce du Parlement ayant adopté le texte à 247 voix pour (et 76 contre), Matignon et les groupes majoritair­es s’étaient refusés à saisir le Conseil constituti­onnel. C’est donc «à titre personnel» que des élus ont déposé le recours devant le garant de la Constituti­on.

L’initiative a fait bondir les députés, pas vraiment dupes de l’opération. Une obstructio­n à peine déguisée qui surprend bon nombre d’élus. Surtout, la saisine des «sages» par des parlementa­ires de la majorité concernant une loi adoptée par la même majorité est atypique. Beaucoup perçoivent dans ce recours la marque de «l’aile droite» de la majorité. Et notamment les députés proches de Blanquer, qui échangent régulièrem­ent dans une boucle Telegram sobrement intitulée «Fan-club JMB». Victor Boiteau et Sacha Nelken

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