Saison 2 : amendements adoptés
Bien que plus expérimenté et doté d’une nouvelle patronne, le héros assistant, Samy, fait toujours mouche avec son air ahuri et son humour absurde.
Ils parlent français, allemand ou anglais avec des accents invraisemblables et manient un jargon incompréhensible fait d’acronymes barbares, en déambulant dans d’interminables couloirs ou des salles impersonnelles : bienvenue dans le monde bizarrement joyeux de Parlement, plongée dans les méandres du Parlement européen. Depuis sa première saison, la série créée par Noé Debré a inventé quelque chose dans le paysage de la fiction française, un je-ne-sais-quoi que l’on pensait plutôt attaché aux séries britanniques : mélange d’ironie et de résignation mais avec une pointe survivante d’idéalisme, on est loin de la peinture virtuose d’un univers à la West Wing, mais plutôt dans l’évocation type The Office, volontiers versée dans l’absurde, de la vie de bureau d’une institution; avec un penchant pour la «romcom» occasionnant son lot de scènes charmantes, comme une leçon de bise à la française (bien en l’air et à côté de la joue comme il se doit) ou une danse solitaire dans un bureau sur de la variété française.
Sautillante. Maintenant que le héros Samy a découvert les lieux et certains rouages, il faut trouver comment alimenter le récit et lui donner à moudre un autre grain que celui de la perpétuelle découverte. Dans cette saison 2, la dimension absurde et légèrement cauchemardesque est moins exploitée, et l’ambiance est plus sautillante, voire un peu trop touffue avant de se resserrer dans sa deuxième moitié sur un projet à faire voter, retrouvant ainsi l’élan ressenti en saison 1. Samy a maintenant une petite amie «woke» qui travaille pour une ONG et qu’il regarde parfois comme un amendement incompréhensible et séduisant, mais une bonne partie de la saison est occupée à scruter sa relation avec sa nouvelle boss (Georgia Scalliet), une ambitieuse députée qui le sadise gentiment tandis que lui essaie de rouler les mécaniques car il en connaît effectivement un peu plus qu’elle sur le fonctionnement des lieux. Elle apprend cependant vite et leur petit jeu de chat et de la souris fonctionne bien. On sent que l’équipe d’écriture a été tentée de rendre Samy plus cynique, de le «salir» un peu, mais finalement ce qui subsiste toujours est son air ahuri de premier de la classe avec ses grandes lunettes, allié à un art de la vanne, envoyée l’air de rien, comme prononcée pour lui-même, que le comédien Xavier Lacaille manie à merveille.
Il a été tenté de rendre Samy plus cynique, de le «salir» un peu
Mentor. Ce qui reste aussi réussi que dans la saison 1, c’est la relation qui lie le héros à son mentor énigmatique, le chef de la commission «pêche» qui répond au nom d’un personnage de Lost: Eamon, génialement interprété par William Nadylam. Prodigieux, il est celui qui emmène la série ailleurs. Où ? On ne sait pas, et d’ailleurs sa diction très particulière, patate chaude indécidable (le héros avoue d’ailleurs n’avoir toujours pas découvert quelle est sa langue maternelle), est là pour le prouver. Cela pourrait même être sur une autre planète. Weird, charismatique et mystérieux, prince sombre menaçant et protecteur à la fois, il emporte la dernière scène de la saison, qu’on ne dévoilera pas mais qui est de ces scènes folles et belles suffisant à elles seules à justifier l’existence d’une série.