Libération

Catherine Colonna, ambassadri­ce de l’UE au Quai d’Orsay

La nomination de la diplomate, en poste au RoyaumeUni depuis 2019, ancienne porte-parole de l’Elysée sous Jacques Chirac, envoie un message européen fort.

- Sonia Delesalle-Stolper

Si elle surprend un peu –son nom n’avait circulé dans aucune des listes fantasmées de la compositio­n du gouverneme­nt– la nomination de Catherine Colonna aux Affaires étrangères est finalement logique. Farouche Européenne, elle prend ces fonctions après presque trois ans à Londres comme ambassadri­ce, où elle a dû batailler pour garder un calme olympien face aux provocatio­ns du gouverneme­nt de Boris Johnson autour du Brexit.

Arcanes. Son arrivée au Quai d’Orsay, où elle travailler­a avec Clément Beaune, promu ministre aux Affaires européenne­s et plus seulement secrétaire d’Etat, envoie un signal sans ambiguïté. Le gouverneme­nt d’Elisabeth Borne sera bien tourné vers l’idée d’une Europe renforcée. A 66 ans, Catherine Colonna en connaît bien les arcanes et les détours, les forces et les faiblesses. Elle fut, entre 2005 et 2007, ministre déléguée aux Affaires européenne­s du gouverneme­nt de Dominique de Villepin.

Née à Dolus-le-Sec, en Indre-etLoire, elle a grandi dans une ferme gérée par un père d’origine corse. Elle se dit terrienne et aime retourner régulièrem­ent «chez elle» pour respirer, reprendre pied dans son enfance. Rigoureuse, elle connaît ses dossiers sur le bout des doigts et a peu de goût pour l’approximat­ion, quand le Quai d’Orsay traverse une crise d’identité, bousculé par une série de réformes engagées sous Emmanuel Macron, comme la «mise en extinction» du prestigieu­x corps diplomatiq­ue d’ici 2023. La nouvelle ministre sera d’ailleurs accueillie par un appel à la grève pour le 2 juin lancé par six syndicats et 400 jeunes diplomates. Longévité. Trouveront-ils rassurant que leur nouveau capitaine soit un pur produit de ce sérail prestigieu­x ? Travailleu­se acharnée, elle a la réputation d’épuiser ses troupes et d’être très exigeante. Après des études à Tours, Catherine Colonna a intégré l’ENA avant d’entrer au Quai d’Orsay à sa sortie. Son premier poste est au service de presse de l’ambassade de France à Washington. En 1995, elle est nommée porte-parole de l’Elysée, sous Jacques Chirac, et crée une première fois la surprise. En 2004, elle confie à Libération avoir été elle-même «abasourdie» par sa nomination. C’est Dominique de Villepin, alors secrétaire général de l’Elysée, qui a suggéré son nom. Elle restera à ce poste plus de neuf ans, une longévité exceptionn­elle. A l’Elysée, dans les rencontres avec les grands de ce monde, elle n’est alors jamais loin de Jacques Chirac, qui la cherche souvent du regard lorsqu’il oublie un nom ou cherche un détail.

Elle a dirigé en 2004 le Centre national de la cinématogr­aphie (CNC), fait un passage à l’Unesco puis dans le privé, avant de retourner au bercail et devenir ambassadri­ce à Rome de 2014 à 2017, puis, en 2019, de franchir la Manche pour Londres. En dépit de sa longue proximité avec Chirac, elle a la réputation d’avoir le coeur plutôt à gauche, même si elle garde faroucheme­nt le choix de son vote secret. Au service de l’Etat et de la République avant tout.

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Photo c. Angelo. ANSA. ABACA Catherine Colonna en 2015.

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