Après le suicide d’un lycéen, Gabriel Attal rouvre le dossier du harcèlement scolaire
Un adolescent de 15 ans, qui avait déjà signalé des faits de harcèlement, a été retrouvé pendu à son domicile dans la soirée de mardi. Alors que le parquet appelle à la prudence sur les causes du drame, le ministre de l’Education a convoqué une conférence de presse mercredi.
Du lycée Adrienne-Bolland de Poissy (Yvelines) jusqu’à la cour du ministère de l’Education nationale, la rentrée est lestée du poids du deuil. Mardi, dans la soirée, un adolescent de 15 ans a été retrouvé pendu chez lui, dans la ville yvelinoise. Au coeur de l’émotion, une nouvelle a très vite été confirmée : le jeune garçon, scolarisé l’année dernière en troisième prépa métier, avait signalé des faits de harcèlement scolaire. A la prudence du parquet de Versailles sur les circonstances de la mort, le ministre de l’Education, Gabriel Attal, a opposé mercredi une conférence de presse organisée en dernière minute.
«C’est un drame qui nous endeuille tous. Notre coeur à tous souffre», a réagi le ministre dans une déclaration concise, indiquant avoir échangé avec la mère de la victime pour lui exprimer «tout son soutien». Il a aussi confirmé que, dès l’année scolaire 2022-2023, des faits de harcèlement avaient été signalés par le jeune homme, évoquant «des brimades et des injures répétées». Selon BFM TV, le garçon avait notamment dénoncé les attaques répétées de deux élèves telles que «T’es nul ! T’es moche ! Personne ne t’aime.»
Alertes. L’Education nationale n’était pas restée de marbre. Dès mars 2023, les parents ainsi que l’adolescent avaient été reçus par le personnel de l’établissement. De même que les élèves mis en cause. Des courriers avaient par la suite été échangés entre la famille de la victime et l’institution scolaire. Sans que les parents ne soient vraiment satisfaits, de l’aveu même de Gabriel Attal. Quand bien même le lycée Adrienne-Bolland assure qu’un suivi avec une CPE avait été mis en place, le jeune homme avait changé d’établissement et avait rejoint pour cette rentrée les classes d’un lycée du XIVe arrondissement de Paris.
Malgré ce contexte, le parquet de Versailles, qui a ouvert une enquête, rappelle qu’«il faut rester à ce stade très prudent». Une circonspection nécessaire, admise par Gabriel Attal, sans être tout à fait de mise dans sa prise de parole. «Le suicide d’un jeune garçon est toujours un drame difficile à expliquer. Il y a évidemment divers facteurs», concède le ministre de l’Education nationale, tout en proclamant que «chaque drame est un drame de trop, qui nous rappelle que nous ne sommes toujours pas à la hauteur». Il a annoncé le lancement d’une enquête interne pour faire la lumière sur les alertes du lycéen et l’arrivée prochaine d’une «initiative forte» à grande échelle sur le harcèlement scolaire.
Entre les débats sur l’abaya, qu’il a lui même suscités, et ceux sur le port de l’uniforme scolaire, le ministre renfourche un autre cheval de bataille de sa première rentrée à la tête du ministère. Pour rappel, en mai, quelques jours après le suicide de Lindsay, une adolescente de 13 ans victime de harcèlement scolaire, la lutte contre ce fléau touchant un élève sur dix s’est intensifiée. La Première ministre, Elisabeth Borne, avait exprimé sa volonté d’en faire «la priorité absolue de la rentrée 2023». Prévu pour la fin septembre, un plan interministériel est attendu pour «mieux prévenir les drames».
Et déjà, depuis le mois de septembre, de nouvelles mesures ont été mises en place. Le programme Phare, établissant un plan de prévention du harcèlement dans les écoles et les collèges, a ainsi été étendu aux lycées depuis septembre. Pour rappel, ce dispositif prévoit notamment la mise en place d’une équipe de cinq adultes (profs, CPE ou assistants d’éducation formés huit jours sur deux ans) dans chaque établissement du secondaire chargée d’intervenir à la première alerte.
Radiation.
Un coordonnateur harcèlement doit également être nommé dans chaque collège. Enfin, un décret du 16 août autorise les directeurs d’école et chefs d’établissement à demander au maire de leur ville la radiation et l’inscription dans une autre école d’un élève qui «constitue un risque pour la santé ou la sécurité d’autres élèves». En primaire, comme il n’existe pas de conseils de discipline comme dans les collèges et lycées où un élève accusé de harcèlement peut être exclu temporairement ou définitivement, ce sont souvent les élèves harcelés qui changent d’école quand la situation n’est pas réglée. Le décret prévoit en outre la possibilité de sanctionner un auteur de cyberharcèlement contre un élève d’un autre établissement.
Grandes annonces gouvernementales à venir ou pas, une cellule psychologique a en attendant été mise en place au lycée Adrienne-Bolland. Sur Twitter (renommé X), le député Renaissance des Yvelines, Karl Olive, ancien maire de Poissy, partage la demande de la famille d’être «protégée de toutes sollicitations extérieures quelles qu’elles soient».•