Le clivage gauche-droite est meilleur pour la démocratie
C’est l’une des hypothèses centrales du livre : «La configuration gauche/droite de type classiste est la plus favorable, aussi bien du point de vue du fonctionnement démocratique que du développement socioéconomique», expliquent les deux économistes. En effet, lorsque l’affrontement entre la droite et la gauche a dominé la vie politique du pays, comme pendant «une large part du XXe siècle de 19001910 jusqu’en 1990-2000, et particulièrement entre 1958 et 1992», la France a connu une plus grande progression dans la marche pour l’égalité – c’est au cours de ces périodes que se mettent en place les fondements d’un Etat social avec une plus grande progressivité fiscale et des dépenses publiques de santé et d’éducation – ainsi que ses plus fortes participations électorales.
A contrario, lorsque la bipolarisation gauche/droite s’affaiblit, la participation politique baisse. C’est le cas de la période 1990-2022 durant laquelle on observe que les classes populaires se détournent des urnes. Les auteurs avancent plusieurs explications à la démobilisation des plus modestes. Ces derniers éprouveraient «un sentiment d’abandon» lié à «la perception d’une convergence des programmes économiques» des partis de droite et de gauche «ralliés au libéralisme économique».
Par ailleurs, ils se désintéresseraient des législatives depuis 2022 et le déroulement de ces élections dans la foulée des élections présidentielles, par «lassitude» et à cause du manque de lisibilité de l’enjeu du scrutin. Thomas Piketty et Julia Cagé relient aussi ce phénomène à l’apparition d’un système partisan fondé sur la tripartition et dominé par un centre libéral («financé de façon plus forte et plus explicite que par le passé par le monde des affaires et les plus aisés»), ou encore à la montée des inégalités d’accès à une information de qualité.