Les électorats populaires des bourgs et des banlieues ont des intérêts communs
Si les comportements politiques des classes populaires de tous horizons géographiques ont fortement divergé au cours de l’histoire récente, qu’elles se situent dans des villages, bourgs, banlieues ou métropoles pauvres, ces territoires connaissent une même expérience de la pauvreté sur les quatre dernières décennies. Depuis les années 80-90, les deux auteurs notent «une nette détérioration de la position des banlieues pauvres et des métropoles pauvres, ainsi qu’une stagnation des bourgs pauvres, si bien qu’au final toutes ces catégories se retrouvent approximativement au même niveau que les villages pauvres dans les années 2010 et au début des années 2020, avec un revenu moyen autour de 80 % de la moyenne nationale». Qu’en concluent les deux économistes ? Que de telles situations socio-économiques partagées pourraient tout à fait amener ces pans de la population à s’allier politiquement. A condition, bien sûr, de comprendre les raisons qui les séparent et de prendre en compte les différences territoriales en termes de coût de la vie et du logement, du type d’emplois occupés, de leur relation à la propriété immobilière, à l’éducation ou aux diplômes. «Ils ont également des expériences différentes face à la question migratoire et à la diversité des origines, concèdent le couple de chercheurs. Il reste que ces différents territoires pauvres ont des intérêts communs qui gagneraient à être mieux mis en avant.» Historiquement, rappellent-ils, les radicaux-socialistes et les socialistes sont parvenus à rapprocher ces électorats à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle en transformant leurs programmes avec des mesures fiscales et sociales. «Tout laisse à penser qu’une conclusion identique pourrait également s’appliquer en ce début de XXIe siècle : c’est en développant un programme de redistribution aussi attractif pour les classes populaires des bourgs et des villages que pour celles du monde urbain que les courants politiques de gauche pourront espérer rassembler les électorats correspondants.» Et parvenir à sortir de la tripartition.