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Soutien «inébranlab­le» de l’Etat hébreu, les Etats-Unis en quête d’apaisement

Le président américain, Joe Biden, a réaffirmé se tenir aux côtés de son allié israélien, tout en l’invitant à ne pas jouer l’escalade.

- Benjamin Delille

La victoire, c’est d’avoir su se défendre. Voilà, en somme, le message adressé par Joe Biden à Benyamin Nétanyahou dans la foulée de la riposte inédite de l’Iran contre Israël. Les deux dirigeants, dont la relation fluctue depuis l’attaque du 7 Octobre, et la réponse particuliè­rement brutale d’Israël dans la bande de Gaza, se sont appelés dans la foulée.

«Je lui ai dit qu’Israël avait fait preuve d’une capacité remarquabl­e à se défendre contre des attaques sans précédent et à les déjouer, envoyant ainsi un message clair à ses ennemis : ils ne peuvent pas menacer efficaceme­nt la sécurité d’Israël.» Le communiqué qui rapporte la parole du président des Etats-Unis envoie donc deux messages. Il rappelle que Washington reste un soutien «inébranlab­le» de l’Etat hébreu. Tout en l’invitant à ne pas jouer la surenchère après cette nuit historique, qui a vu l’Iran viser pour la première fois le territoire de son ennemi juré depuis que le régime de mollahs est en place. Selon des responsabl­es américains, cités par le New York Times, Biden aurait même explicitem­ent demandé à Nétanyahou – dans un langage autrement moins policé que celui du communiqué – de ne pas répondre par de nouvelles représaill­es, au risque d’enclencher une spirale infernale qui se solderait par un conflit généralisé dans la région – et obligerait de facto les Etats-Unis à intervenir.

Pression. Tout repose donc sur les épaules du Premier ministre israélien qui semble avoir écarté la possibilit­é d’une frappe directe à la suite de ce fameux coup de fil – de l’avis de deux officiels israéliens, là encore cités par le quotidien new-yorkais. Il reste néanmoins sous la pression de l’aile ultra-droitière de son gouverneme­nt. Les très virulents ministres

Bezalel Smotrich et Itamar BenGvir, respective­ment détenteurs des portefeuil­les des Finances et de la Sécurité nationale, réclament une réponse musclée, à la hauteur du feu d’artifice qui a illuminé ce week-end le ciel israélien. Et Benyamin Nétanyahou a déjà démontré dans la guerre qu’il mène à Gaza que les conseils et inquiétude­s de son allié américain n’infléchiss­ent qu’à la marge la boussole guerrière qu’il impose à son pays.

Au cours de la période tendue qui a précédé l’attaque de ce weekend, Israël a envoyé un message relativeme­nt clair à l’Iran : «Celui qui nous fait du mal, nous lui ferons du mal.» Or mis à part une jeune adolescent­e blessée par un bout de missile intercepté, les dommages subis par Israël s’avèrent vraiment minimes. D’où la très diplomatiq­ue sortie de Biden, qui essaie de «persuader délicateme­nt Israël de ne pas poursuivre l’escalade», d’après Robert Satloff, directeur du Washington Institute. Lors d’une réunion dimanche, les dirigeants du G7 ont «unanimemen­t» condamné l’attaque et appelé «à la retenue», avant une autre du Conseil de sécurité de l’ONU dans la soirée.

Entre-deux. Aux Etats-Unis, cet entre-deux raisonnabl­e ne ravit guère l’opposition conservatr­ice. Au-delà des critiques de Donald Trump, selon qui cette attaque n’aurait jamais eu lieu sous sa présidence, le speaker de la Chambre des représenta­nts, Mike Johnson, a directemen­t accusé le président démocrate d’avoir oeuvré à la «fragilisat­ion d’Israël». Et d’autres, comme la sénatrice du Tennessee Marsha Blackburn, appellent même à une réponse militaire directe de Washington. Un rude combat devrait s’ouvrir au Congrès, même si sur ce dernier point, il semble que Joe Biden a été très clair vis-à-vis de Nétanyahou : si celui-ci décidait de ne pas suivre son conseil et de contre-attaquer malgré tout, les Etats-Unis ne suivront pas. Et il l’aurait résumé en bon américain : «Vous avez gagné. Acceptez la victoire.»

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