Européennes : à Nantes, Glucksmann réveille les espoirs du camp socialiste
Samedi, dans l’enceinte déjà bien remplie du Zénith de Nantes, une socialiste regarde les images filmées à l’extérieur comme pour réussir à y croire: une longue file de militants patiente pour venir écouter Raphaël Glucksmann, tête de liste du PS pour les européennes du 9 juin. Alors que le député européen grimpe dans les sondages, les socialistes, après des années douloureuses, savourent.
«Je sens un frémissement, affirme l’ex-Premier ministre Jean-Marc Ayrault. L’étape de la Nupes est passée. Cette campagne permet de clarifier les choses, sur l’Otan, sur l’Europe, l’Ukraine ou la laïcité.» Un peu plus loin, Stéphane Troussel, président du département de Seine-Saint-Denis, observe les gradins. Trois mille personnes, selon les organisateurs. En 2019, le candidat n’avait participé à aucun meeting hors de Paris. Preuve qu’entre les deux campagnes menées par l’essayiste et son mouvement Place publique, quelque chose a changé. L’eurodéputée Aurore Lalucq, numéro 4 sur la liste, résume sur scène: «[Nous sommes] la liste qui fait barrage à l’extrême droite, qui propose un horizon de déclassement et de chômage, celle qui combat le greenwashing de Mme Hayer, qui consiste à mettre une veste verte, c’est la liste responsable, qui défend le green deal, celle qui fixera un cap, avec des objectifs sociaux et environnementaux.» A deux mois du scrutin, le camp Glucksmann espère perturber le face-àface annoncé entre Jordan Bardella, le candidat du RN, et Valérie Hayer, celle de la majorité, quelques points devant les socialistes dans les sondages. «Mme Hayer veut des règles budgétaires, nous, on veut des règles climatiques.
On veut obliger les Etats à investir. Qui paie ?» interroge-telle avant de faire résonner un «taxez les riches !» dans la salle, qui fait écho à la proposition de Glucksmann de taxer les super-riches à l’échelle européenne. Devant le slogan «Réveiller l’Europe», inscrit en rose sur fond jaune, la maire de Nantes, Johanna Rolland, oppose la nécessité d’un «protectionnisme européen» aux «patriotes de pacotille». «Une Europe puissante, qui n’est pas le cheval de Troie du néolibéralisme, précise Olivier Faure, premier secrétaire du PS. C’est à nous de mener la grande confrontation avec l’extrême droite, pas dans trois ans, mais maintenant. Après sept années de macronie, elle n’a jamais été aussi proche de la victoire, il faut créer l’alternative, et ça commence le 9 juin.»
Sur le son de We Are Your Friends, Glucksmann, tout sourire, fend la foule jusqu’à la scène. L’essayiste, qui avait eu du mal à jouer le candidat en 2019, a promis qu’il aurait moins de doutes cette fois-ci. Sur scène, il joue son rôle, les bras en signe de victoire, le poing serré, puis la main sur le coeur pendant que la salle applaudit. «Nous sommes en train de réveiller la gauche de Badinter et de Delors, que tout le monde avait enterrée», revendique celui que les socialistes espèrent voir reconstituer l’électorat socialdémocrate dépecé par Macron et Mélenchon. «Nous sommes les seuls à pouvoir opérer la grande bascule sociale et écologique», poursuit-il avant d’insister sur «la clé de voûte» de son projet : «l’émergence d’une puissance écologique européenne».