Libération

Les Jeux vont entrer dans Paris

Encombreme­nts et complicati­ons diverses, tout le monde, au moins en Ile-de-France, va participer, qu’il le veuille ou non. Il n’y aura pas que des vainqueurs.

- Par MATHIEU LINDON

Est-ce que le Président s’entraîne dur pour nous préparer une surprise, maintenant qu’il fait de la boxe, ou se contentera-t-il de regarder les JO du haut de l’Olympe ?

Si j’ai bien compris, il y a des gens qui sont contents d’accueillir les Jeux olympiques en France. C’est une occasion merveilleu­se de faire connaître Paris dans le monde. On va rayonner grave. On aura enfin des étrangers payants, des bons étrangers sonnants et trébuchant­s qui viendront manger notre pain, nos fromages et prendre notre métro à quatre fois le prix. Ce sera aussi l’occasion de voir si le chauvinism­e est un vice ou une vertu.

On reste sur des résultats lamentable­s quand les Jeux se sont déroulés à l’étranger, avec un public honteux soutenant les siens au détriment des nôtres, ça va changer, alors espérons que les résultats aussi. Certes, on ne pourra pas accuser le décalage horaire, cette fois-ci, ni la nourriture ni les coutumes exotiques. Le slogan défaitiste de l’ignoble baron de Coubertin va se heurter aux réalités économique­s: financière­ment, l’essentiel n’est pas de participer au déficit mais de gagner du bel et bon argent ou du bel et bon or. Bien sûr, l’inconvénie­nt, à domicile, c’est la pression. Avoir sa maman, son papa, son grand-papa, sa grand-maman et ses amis qui regardent nos sportifs, ça peut autant leur donner envie de bien faire que peur de mal faire. Et puis, pour nos nageurs qui connaissen­t la Seine de longue date, n’est-ce pas un peu intimidant ou même téméraire de prétendre se jeter dedans? Malgré leurs combinaiso­ns en course, verra-t-on sur le podium des nageurs couverts de boutons et de cloques impatients de se précipiter aux toilettes ? Sans compter le lobby des pêcheurs mécontents temporaire­ment interdits d’exercer leur calme activité et nargués par des poissons insolents.

Il y a des gens qui s’étonnent. On a payé des milliards, en période de disette de milliards, pour acquérir ces Jeux, et on n’a même pas pris l’assurance annulation. Bon, on a sûrement un plan B comme Belgique s’il y a trop de problèmes, si rien n’est prêt, si les athlètes arrivent en retard du fait des grèves ou des simples retards habituels dans les transports, s’il fait trop chaud et qu’ils se traînent, si les pistes fondent et les perches mollissent, si au contraire on a un temps de merde et que tous ces sportifs prennent froid sans avoir le droit d’avaler le moindre petit cachet, si on n’a pas abandonné les contrôles au faciès et qu’en définitive les étrangers ne sont pas au stade à cause de contrôles d’identité dans la rue qui ont mal tourné pour cause de principe de précaution, s’il y a une invasion de punaises de lit dans le village olympique et que les champions et les championne­s ne font rien que se gratter pendant les compétitio­ns (c’est pour les tireurs d’élite que ce sera le plus dur), si on n’a aucune médaille – ce qui peut tout aussi bien être une nouvelle forme de l’hospitalit­é française, quoique les sondages pour les européenne­s ne manifesten­t pas que ce soit cette tournure qu’elle prenne, l’hospitalit­é française.

Est-ce que le Président s’entraîne dur pour nous préparer une surprise, maintenant qu’il fait de la boxe, ou se contentera-t-il de regarder les Jeux olympiques du haut de l’Olympe? Est-ce que le bon vin français est considéré comme un produit dopant, ce qui serait une honte quand on constate ses effets à court terme ? D’un autre côté, on a rarement vu un coureur de 100 mètres ivre dans les starting-blocks partir à l’envers en entendant le coup de pistolet du starter qui, dans cette ambiance sécuritair­e, peut plutôt faire s’enfuir tout le public paniqué qu’un terroriste se soit introduit en plein milieu du stade. Et s’il se passait quelque chose de plus amusant pendant les Jeux et que personne ne s’y intéressai­t ? Si j’ai bien compris, ce n’est pas entre le 26 juillet et le 11 août qu’il faudra nous trouver l’assassin du petit Grégory. •

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