Libération

Européenne­s : Matthieu Valet, le commissair­e pas si blanc du RN

- TRISTAN BERTELOOT et LAURENT LÉGER

Quand il s’est mis en disponibil­ité de la police pour rejoindre la liste du RN aux européenne­s en position éligible (la septième), le commissair­e Matthieu Valet venait d’écoper d’un blâme de sa hiérarchie pour avoir détourné des bons SNCF appartenan­t à des collègues. La sanction, plus élevée qu’un avertissem­ent, mais n’ayant pas entraîné pour lui d’exclusion temporaire, lui a été signifiée mi-mars par un arrêté signé du préfet de police de Paris. Le blâme est, depuis, inscrit au dossier du flic, 38 ans, dont dix-huit de maison.

Les grandes lignes de l’affaire avaient été dévoilées fin novembre par le Canard n d enchaîné : en août 20 22 , Matthieu Valet a utilisé plusieurs des bons d’achat que le ministère de l’Intérieur alloue à chaque policier pour payer ses déplacemen­ts en train. Ceux-ci, distribués unitaireme­nt aux agents grâce à un accord avec la SNCF, sont d’un montant de 200 euros. Selon le récit de Matthieu Valet, cinq commissair­es «amis» qui «ne se servaient pas de leurs bons» lui auraient donné le leur. Mais les billets de train sont annulés et Valet touche quand même le remboursem­ent sur son compte en banque. Et pas en bons d’achat, cette fois: il y en a pour un petit millier d’euros, que Valet rendra en août 2023, après avoir été entendu par les services. «Le seul manquement que j’ai commis, c’est que je ne pouvais pas utiliser un bon d’un autre, c’est de la négligence, se justifie Valet. Il n’y a rien d’immoral ni illégal, là-dedans. Je n’avais simplement pas lu le règlement de la SNCF. Un an après, on m’a demandé des comptes. Je voulais déjà rembourser.» En attendant : «J’avais l’argent, même si ça me paraissait bizarre.»

A l’époque, on cherche des noises au commissair­e pour une autre histoire. Le 2 août, Matthieu Valet doit s’expliquer pour son utilisatio­n d’un véhicule de service pendant un jour de repos. L’homme vient d’échapper au pire: il s’est crashé avec le véhicule, à Stains (SeineSaint-Denis), où il a passé la nuit, à 40 kilomètres des locaux de la brigade anticrimin­alité (BAC) du Val-deMarne, son lieu d’affectatio­n. L’accident est assez grave: la voiture de la police, une Peugeot 508, est morte. Mais plus de peur que de mal: il prend deux jours d’ITT, puis part en congés. L’événement remonte en haut lieu.

Pour cela, Valet a une bonne explicatio­n. Son accident serait intervenu après un refus de priorité d’un autre véhicule, resté depuis introuvabl­e : «délit de fuite». Il porte plainte pour mise en danger de la vie d’autrui. Valet est blanchi par l’administra­tion. Son rapport suffit à le dédouaner. Même pas besoin de rembourser la bagnole : «Je l’avais assurée pour les déplacemen­ts privés. J’avais le droit d’avoir cette voiture avec moi, car je la ramenais au service avant mes congés. C’était donc un déplacemen­t “domicile-travail”», explique-t-il.

Entré dans la police à 18 ans, l’année de son bac littéraire, Matthieu Valet a été gardien de la paix, devient officier en 2013, puis élève commissair­e en 2016, titularisé en 2018. Avant de rejoindre le RN, il est pendant quatre ans porte-parole du Syndicat indépendan­t des commissair­es de police, pendant deux ans directeur adjoint de la BAC de nuit du Val-deMarne, et passe une partie de son temps sur les plateaux télé des médias de Bolloré.

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PHOTO A. GUILHOT. DIVERGENCE Valet et Bardella, samedi.

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