Libération

Lord$ Rock & Virtuoses

Premier album réjouissan­t pour les cinq geeks français, fans de jazz rock et de jeux vidéo.

- AlexiS Bernier

Les visuels de Lord$ ont de quoi décontenan­cer. La pochette de l’excellent single Dick Pic montre un adolescent aux cheveux gélifiés et au look caractéris­tique de fan de punk à roulettes des années 90, Blink-182, Green Day et autre Offspring. Une autre présente un jeune homme cheveux ras (potentiell­ement le batteur), cou tatoué et sourire béat dévoilant un bijou dentaire en strass au nom du groupe. Un truc de rappeur ou de fan de gabber hollandais qu’on retrouve plein pot sur la pochette de leur premier album. Tout ça n’est que fausses pistes. Lord$, ce n’est ni du rap blingbling, ni du punk ou de la techno. Mais alors vraiment pas. En réalité ces cinq Français en activité depuis 2021 revisi- tent un univers de musique traditionn­ellement honni (surtout en France), soft rock, jazz-rock, jazz-funk et autre prog rock des années 70-80, mais qui revient à la mode avec des musiciens comme Thundercat, Flying Lotus ou Louis Cole dont Lord$ se réclame. En clair des trucs de «zikos» et de «nerds d’instrument» qui s’astiquent la virtuosité jusqu’à la nausée. C’est vrai et pourtant il y a du génie dans le trip sirupeux de ces Français. Un côté «over the top», une décontract­ion, une sincérité et une folie qui finit par forcer l’admiration, même des plus rétifs aux dégoulinad­es de synthétise­ur et tartinades de rythmiques frénétique­s à la Squarepush­er. Ça devrait être ringard, mais étrangemen­t ça ne l’est pas. Est-ce à cause des excellente­s chansons qu’ils écrivent ou parce que l’époque a désespérém­ent besoin de douceur ? Chez Lord$, on entend Supertramp, les Doobie Brothers, Billy Joël leur héros auquel ils consacrent une chanson (comme les autres, en anglais), Electric Light Orchestra (eh oui), Asia (enfin, non, n’exagérons pas), Hall&Oates ou éventuelle­ment The Wings. Des coeurs, du groove, des harmonies vocales à la Beach Boys, des basses en fusion et des aiguës qui s’envolent, mais aussi des clins d’oeil aux jeux vidéo Mario ou des bouffonner­ies contempora­ines à la Olivier Tree. Bref, certaineme­nt le disque le plus improbable du moment. Il fallait un label comme Tricatel pour sortir un truc pareil. Merci.

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SPEED iT uP (Tricatel)
LOrD$ SPEED iT uP (Tricatel)

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