Libération

Gaza : les syndicats étudiants appellent à la mobilisati­on «dans toute la France»

- PAULINE MOULLOT et LUCAS ZAÏ-GILLOT

La mobilisati­on sur les campus américains va-t-elle essaimer en France ? Depuis une dizaine de jours, les manifestat­ions de soutien à la Palestine contre l’offensive israélienn­e à Gaza se multiplien­t aux Etats-Unis. En France, la direction de Sciences-Po Paris, bloqué de jeudi à vendredi par des soutiens et militants du comité Palestine de l’école, a finalement accepté plusieurs revendicat­ions et le blocus a été levé. Les étudiants de la rue Saint-Guillaume ont malgré tout réitéré leur appel à se mobiliser pour un cessez-le-feu permanent et invité les autres université­s à les rejoindre.

n d «Musellemen­t». Sam edi , Gabriel Attal a rallumé l’étincelle. En marge d’un déplacemen­t dans la Manche, le Premier ministre, déplorant «le spectacle navrant et choquant» du blocage de Sciences-Po, a rappelé la fermeté du gouverneme­nt : «Il n’y aura jamais de droit au blocage, jamais de tolérance avec l’action d’une minorité agissante et dangereuse qui cherche à imposer ses règles à nos étudiants et nos enseignant­s.» Dans la soirée, l’Unef a dénoncé «les dérives autoritari­stes du gouverneme­nt» et «le musellemen­t de la jeunesse», appelant celle-ci «à se saisir de ses lieux d’études sous toutes les formes qu’elle considère comme légitimes».

Même réaction du côté de l’Union étudiante, issue d’une fusion entre le syndicat l’Alternativ­e (proche de LFI) et d’une partie de l’Unef, désormais premier syndicat dans les facs françaises, qui a appelé les étudiants «partout en France […] à se soulever contre la répression et pour la paix à Gaza». Au-delà de la situation internatio­nale, c’est la réaction du gouverneme­nt qui fait réagir. «Cela fait maintenant plusieurs mois qu’on est mobilisés sur la question palestinie­nne. On voit que la répression est de plus en plus forte sur les campus depuis plusieurs semaines, explique la porte-parole de l’Union étudiante Eléonore Schmitt. La mobilisati­on à Sciences-Po a ouvert la brèche. C’est le moment ou jamais de montrer que la jeunesse est mobilisée.» L’interventi­on des CRS à Sciences-Po, l’interdicti­on de conférence­s de Jean-Luc

Mélenchon, les convocatio­ns pour «apologie du terrorisme» de Rima Hassan et de Mathilde Panot, tout comme la condamnati­on d’un syndicalis­te CGT pour le même motif, sont autant de raisons pour les jeunes de se mobiliser contre «un gouverneme­nt qui surréagit. Aujourd’hui, on a une mobilisati­on de la jeunesse sur Gaza, mais pas que [sur ça]. Non seulement on n’est pas écoutés, mais on est réprimés. On est arrivés à un stade de non-retour», expose Hania Hamidi, secrétaire générale de l’Unef, qui reproche au gouverneme­nt d’avoir «peur de la jeunesse».

«Exception». Si des actions sont déjà prévues à Grenoble, Rennes, Lille ou Lyon, difficile de prévoir l’ampleur du mouvement alors que certains rentrent de vacances ce lundi et que les périodes d’examens de fin d’année démarrent. De l’aveu même des responsabl­es syndicaux, «les actions seront plus ou moins massives selon les villes et le calendrier universita­ire». Les deux organisati­ons étudiantes prévoient toutefois une large mobilisati­on pour le 1er Mai aux côtés des organisati­ons syndicales. Du côté des présidence­s d’université, l’heure est à l’apaisement. «Les université­s françaises, contrairem­ent à ce qu’on pourrait lire ou entendre, ne sont pas à feu et à sang», a déclaré le président de l’université de Strasbourg, Michel Deneken, sur RMC. Alors que dans l’ensemble des facs, la mobilisati­on est restée «dans le cadre de débats sereins et du respect de la liberté d’expression», la fin de semaine à Sciences-Po fait plutôt figure «d’exception», explique Mathias Bernard, président de l’université Clermont-Auvergne et membre du conseil d’administra­tion de France Université­s, qui juge que «jusqu’à présent, la situation a été maîtrisée, même si on reste tous très vigilants». La crainte d’un «embrasemen­t généralisé» ne semble pas à l’ordre du jour chez ses collègues, même si «l’intensité et la forme de ces mobilisati­ons peuvent être très différente­s d’un établissem­ent à un autre selon les militantis­mes des étudiants et la culture des université­s».

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