Libération

JÉRÔME SEGAL

- R.M.

VEGANWASHI­NG. L’INSTRUMENT­ALISATION POLITIQUE DU VÉGANISME

Lux, 168 pp., 15 €.

L’incipit est fait pour intriguer : «Où l’on parle d’automobile­s véganes, du conflit israélo-palestinie­n et de l’usage de l’intelligen­ce artificiel­le pour produire du fromage.» Mais, par quelques exemples (la sellerie de voitures en cuir de bambou), le propos s’éclaire vite: il s’agit de montrer (alors que, soit dit en passant, la part des véganes dans les population­s occidental­es «reste assez stable, oscillant en général entre 0,5 et 1 %») comment le recours aux valeurs du véganisme cache souvent des politiques, des stratégies industriel­les ou commercial­es dont les objectifs n’ont pourtant rien à voir avec «le sort des animaux, la santé des humains ou l’état de la planète». C’est à cette instrument­alisation que renvoie le veganwashi­ng (à savoir «la communicat­ion mensongère des entreprise­s polluantes qui de la sorte vont tenter de verdir leur image»), sur lequel les personnes qui défendent le véganisme se divisent ellesmêmes, les unes pensant que les intentions importent peu pourvu que se réduise «le nombre d’animaux maltraités et tués», les autres estimant qu’il faut à tout prix ne pas couper le véganisme de sa dimension politique ou philosophi­que, sous peine de le voir réduit à un «simple effet de mode». Journalist­e et chercheur à Vienne, en Autriche, et maître de conférence­s à la Sorbonne, Jérôme Segal, établit d’abord un «état des lieux» du véganisme, avant d’analyser en détail les conséquenc­es du veganwashi­ng, et exhumer les «liens ambigus» qu’il peut y avoir entre véganisme et capitalism­e, au sens où «c’est incontesta­blement la quête du profit qui amène les investisse­urs à soutenir des projets aussi variés que la viande de culture ou l’élaboratio­n de fromages végétaux selon des recettes conçues par l’intelligen­ce artificiel­le».

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