Lire

L’objet pensant

Un traitement de la philosophi­e dans toutes ses dimensions.

- Gilbert SIMONDON Corps et âmes : Une histoire de la personne au Moyen Age par 400 p., Flammarion, 26 En librairie le 7 septembre. Les Guerres du climat : Contreenqu­ête sur un mythe moderne par 48 p., CNRS Editions, 5 En librairie le 1er septembre.

Après Cours sur la perception (2006), Communicat­ion et informatio­n (2010), Sur la technique (2014), Imaginatio­n et invention (2014) et Sur la psychologi­e (2015), Sur la philosophi­e sÕinscrit dans la sŽrie des textes en partie posthumes de Gilbert Simondon ŽditŽs par les Puf. LÕÏuvre originale de ce thŽoricien de lÕobjet technique et de lÕindividu­ation suscite un intŽr•t croissant comme en tŽmoigne la multiplica­tion des traduction­s et des Žtudes qui lui sont consacrŽes dans le monde. Dans Sur la philosophi­e, qui rŽunit des textes de nature diverse (cours, Žtudes, notes, etc.) et trois chapitres qui devaient initialeme­nt faire partie de lÕun de ses deux grands livres ( Du mode d’existence des objets techniques et L’Individuat­ion à la lumière des notions de forme et d’informatio­n), Simondon traite sous diffŽrents aspects, parfois de manière oblique, de la philosophi­e telle quÕil la concevait, de ses rapports avec lÕhistoire de la pensŽe (Ç Sciences de la nature et sciences de lÕhomme È), avec lÕŽpistŽmo­logie (de la cybernŽtiq­ue notamment), de sa portŽe culturelle et politique enfin. Sur la philosophi­e montre en quoi les rŽflexions de Simondon sur lÕobjet technique constituen­t un modèle gŽnŽral dÕintellig­ibilitŽ pour la connaissan­ce et une norme pour lÕaction. Loin dÕ•tre uniquement centrŽe sur lÕobjet technique, sa pensŽe engage ainsi une rŽflexion sur la philosophi­e dans toutes ses dimensions. Le lecteur y trouvera m•me des ŽlŽments dÕune philosophi­e de lÕhistoire qui se distingue notamment par lÕespoir (et la conviction) que lÕon peut penser le progrès sans pour autant faire de la nŽgativitŽ son moteur.

Jean Montenot

Professeur ˆ lÕEcole des hautes Žtudes en sciences sociales, ayant jadis travaillŽ avec Jacques Le Goff sur les reprŽsenta­tions mŽdiŽvales de lÕenfer et, par ailleurs, spŽcialist­e engagŽ des zapatistes du Chiapas, JŽr™me Baschet mène avec Corps et âmes une enqu•te comparativ­e sur les conception­s mŽdiŽvales de lÕ‰me et du corps. Il y bat en brèche le lieu commun simplifica­teur qui Ð sÕautorisa­nt notamment de saint Paul et de saint Augustin Ð tend ˆ rŽduire la pensŽe mŽdiŽvale de la personne ˆ lÕoppositi­on conflictue­lle entre la chair corrompue et lÕesprit salvateur. AnimŽe par une Ç dynamique anti-dualiste qui pousse ˆ concevoir de manière toujours plus positive la relation de lÕ‰me et du corps È, la pensŽe mŽdiŽvale, revisitŽe dans la perspectiv­e dÕune dŽfinition de la personne comme Ç •tre social individuŽ È, affirmerai­t en fait lÕunitŽ psychosoma­tique de la personne humaine.

Voici un tout petit livre grandement prŽcieux. Il sÕattache ˆ analyser un aspect de la doxa Žcologique considŽrŽe pour ce quÕelle est : une idŽologie. Comme toute idŽologie, la Ç pensŽe È Žcologique est, tout ˆ la fois, un reflet du monde rŽel et une fabricatio­n de mythes. Bruno Tertrais, en politologu­e scrupuleux, nous invite alors ˆ regarder de près lÕun de ces mythes : celui des Ç guerres climatique­s È que les changement­s de climat nous promettrai­ent.

Notons dÕemblŽe que lÕauteur ne discute pas de la question m•me du Ç changement climatique È et, moins encore, de lÕŽventuel rŽchauffem­ent de la planète. On ne saurait donc, sans examen, le ranger dans la catŽgorie disqualifi­Že Retra• ant ˆ grands traits les reprŽsenta­tions mŽdiŽvales de la personne ˆ travers non seulement ses dimensions philosophi­ques, religieuse­s, sociales ou sexuelles, mais encore ses enjeux eschatolog­iques (quÕen est-il de la personne dans lÕau-delˆ ?), ses aspects iconiques ( voir les intŽressan­tes remarques sur les figuration­s Ç somatomorp­hes È de lÕ‰me), lÕouvrage permet dÕŽclairer la Ç singularit­Ž civilisati­onnelle È de lÕOccident ˆ nouveaux frais, se rŽfŽrant notamment ˆ lÕanthropo­logie de Philippe Descola et aux conception­s de lÕindividu­ation dŽveloppŽe­s par Gilbert Simondon, et il invite ˆ forger une reprŽsenta­tion transindiv­iduelle et non Žgo•que de lÕindividu humain. Bref, un livre suggestif. J.M.

Gilbert Simondon, Jérôme Baschet,

des Ç climatosce­ptiques È. Non, ce ˆ quoi il sÕattache, en sÕappuyant sur de nombreuses Žtudes, nationales et internatio­nales, cÕest de savoir si lÕon peut Žtablir des corrŽlatio­ns pertinente­s entre variables climatique­s et facteurs belligènes. Et la rŽponse est clairement non. Avec de nombreux auteurs, Bruno Tertrais peut soutenir Ç quÕil nÕest pas possible dÕidentifi­er une relation de causalitŽ entre changement environnem­ental [É] et conflit armŽ È. Ou encore que lÕenvironn­ement est un Ç facteur non essentiel [É] un parmi une myriade dÕautres dans le tissu de relations de causalitŽ qui explique les conflits È. Bref, ce sont le politique, lÕethnique et lÕŽconomiq­ue qui restent bien au principe des conflits armŽs. Et pour nous le rappeler, lÕauteur a cette jolie formule : Ç La nature de lÕEtat est bien plus importante que lÕŽtat de la Nature. È Marc Riglet

Bruno Tertrais,

 ??  ?? HH Sur la philosophi­e (1950-1980) HH HHH
HH Sur la philosophi­e (1950-1980) HH HHH

Newspapers in French

Newspapers from France