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DAVID MITCHELL

L’Ame des horloges

- David MITCHELL

LE LIVRE Il n’est pas besoin d’être H. G. Wells ou Marcel Proust pour savoir que la littératur­e est, par essence, une machine à explorer le temps. David Mitchell l’a bien compris, et l’avait d’ailleurs illustré de la plus belle des manières avec Cartograph­ie des nua

ges, sans doute l’un des plus grands chefs-d’oeuvre du genre fantastiqu­e de ces vingt dernières années. Le Britanniqu­e se lance à nouveau aujourd’hui dans une vaste fresque explorant différente­s époques, au titre aussi mystérieux qu’explicite :

L’Ame des horloges. Le roman s’ouvre en 1984, avec l’histoire d’une adolescent­e fugueuse de 15 ans vivant dans le Kent, Holly Sykes. Celle-ci a une particular­ité : elle est régulièrem­ent hantée par des hallucinat­ions – ceux qu’elle appelle les « gens-de-la-radio » viennent en effet lui parler. Mais dans quel but ? Le destin de Holly sera alors le prétexte à une grande odyssée puzzle, sur près de six décennies, voyant s’affronter deux clans – les Anachorète­s et les Horlo - gers –, où l’on croisera d’innombrabl­es personnage­s : son frère Jacko, une mystérieus­e vieille dame, un étudiant recherché par la police, une dénommée Immaculée Constantin, un journalist­e de guerre, un écrivain autrefois à la mode ne supportant pas le déclin, etc. Il faudra aussi compter sur l’étrange Docteur Marinus ou sur un dénommé Xi Lo qu’on a peut-être connu sous un autre nom, dans une autre enveloppe… Strates temporelle­s qui s’entrechoqu­ent, immortalit­é et identités fluctuante­s sont ainsi au coeur de L’Ame des horloges, qui s’interroge au passage sur le devenir humain et les dérèglemen­ts environnem­entaux. Si ces presque huit cents pages feuilleton­esques ne sont pas exemptes de naïvetés, d’images parfois à la lisière du kitsch et d’un style un peu relâché, elles n’en montrent pas moins une ambition, une générosité et une puissance romanesque hors du commun. Baptiste Liger

VAGUE DE CHALEUR 1984

30 juin

Je tire d’un coup les rideaux, et malgré le ciel assoiffé et la Tamise gavée sur toute sa largeur de navires, de barques et de tout un tas de choses, je repense aux yeux chocolat de Vinny, à son dos ruisselant de mousse de shampooing, à ses épaules perlées de sueur et à son rire malin, alors mon coeur s’emballe et je me dis La vache, qu’est-ce que j’aurais aimé me réveiller chez Vinny à Peacock Street, et pas dans ma chambre à la con. Hier soir, les mots sont sortis tout seuls : « Ah, tu sais, je t’aime vraiment, Vin. » Et Vinny, recrachant sa fumée, a pris la voix du prince Charles et répondu : « Figurez-vous que, moi-même, j’adore passer du temps à vos côtés, Holly Sykes. » J’ai failli me pisser dessus tellement je riais, même si j’avoue que j’étais un peu vexée qu’il ne m’ait pas dit : « Moi aussi, je t’aime » en retour. Mais bon, tous les magazines vous le diront : les garçons font toujours les clowns quand ils cherchent à cacher leurs sentiments. J’aimerais tellement pouvoir lui téléphoner, là, maintenant. Si on pouvait inventer des téléphones qui nous permettrai­ent d’appeler n’importe qui, n’importe quand, et depuis n’importe où. Blouson en cuir avec LED ZEP clouté sur le dos, il doit être sur sa Norton, en route pour son travail à Rochester. En septembre, dès que j’aurai seize ans, il m’emmènera faire une virée sur sa moto. En bas, quelqu’un claque la porte d’un placard. Maman. Personne d’autre ne se permettrai­t de claquer une porte aussi fort. Imagine si elle a découvert, me nargue une petite voix. Impossible. On a fait ultragaffe, moi et Vinny. C’est sa ménopause, à Maman. Ça doit être ça.

Fear of Music des Talking Heads est sur ma platine ; je dépose le saphir sur le disque. Vinny me l’a acheté à notre deuxième rendez-vous du samedi, au Magic Bus, le disquaire. Il est incroyable, cet album. J’adore « Heaven » et « Memories Can’t Wait », mais le reste aussi tient carrément la route. Vinny a été à New York et les a vus sur scène. Son pote Dan, qui assurait la sécurité, l’a fait rentrer en coulisse après le concert, et Vinny est resté avec David Byrne et le reste du groupe. S’il y retourne l’année prochaine, il m’emmènera avec lui. En m’habillant, je découvre tous les suçons sur mon corps, et je meurs d’envie de rejoindre Vinny ce soir, mais il doit déjà voir ses potes à Douvres. Les hommes n’aiment pas quand les femmes se montrent jalouses ; alors je fais semblant de ne pas l’être. Ma meilleure amie Stella est partie à Londres : elle espère dénicher des fringues aux puces de Camden. Comme Maman a dit que j’étais encore trop jeune pour aller toute seule à Londres, Stella y est allée avec Ali Jessop. Ce que je vais faire de plus excitant aujourd’hui, c’est de passer l’aspirateur dans le pub, en échange de quoi j’aurai droit à mes trois livres d’argent de poche. Super. Puis il faudra que je révise pour les contrôles de la semaine prochaine. Je ne sais pas ce qui me retiendra de rendre copie blanche et de leur dire, au bahut, où ils peuvent se carrer le théorème de Pythagore, Sa Majesté des mouches et le cycle de vie des vers. J’en serais capable, de ça aussi. Ouais. Je ne sais pas ce qui me retient.

En bas, dans la cuisine, niveau ambiance, c’est l’Antarctiqu­e. « Bonjour », je leur dis, mais seul Jacko, assis dans le renfonceme­nt de la fenêtre, lève les yeux de son dessin. Sharon est de l’autre côté, dans la partie salon, où elle regarde un dessin animé. Papa est au rez- de- chaussée, dans l’entrée, où il cause avec le livreur – dehors, le camion de la brasserie bougonne devant le pub. Maman coupe des pommes à cuire en petits cubes ; elle me fait la tronche. Je suis censée lui dire : « Qu’est-ce qu’il y a, Maman, qu’est-ce que j’ai fait? »… plutôt mourir. Elle s’est sans doute aperçue que j’ai dépassé ma permission, hier soir, mais ce n’est pas moi qui vais aborder la question. Je verse du lait sur mes Weetabix et porte mon bol jusqu’à la table. Maman claque le couvercle sur la casserole et me rejoint. « Alors ? Quelle est ton excuse ? – Et bonjour à toi, Maman. Il va encore faire chaud, aujourd’hui. – Qu’as-tu à dire pour ta défense, jeune fille ? » Dans le doute, feindre l’innocence. « De quoi tu parles, exactement? » Elle me lance son regard de serpent. « À quelle heure tu es rentrée? – C’est bon, d’accord, j’étais légèrement à la bourre, pardon. – Deux heures de retard, je ne dirais pas “légèrement à la bourre”. Tu étais où? » Je prends le temps de mâcher mes Weetabix. « Chez Stella. Pas vu l’heure filer. – Tiens donc, comme c’est bizarre ! À dix heures, j’ai appelé la mère de Stella pour essayer de savoir où tu étais, et devine : elle m’a dit que tu étais partie avant huit heures. Laquelle de vous deux je devrais croire, à ton avis, Holly : toi ou elle ? » Et merde. « Après chez Stella, je suis allée marcher. – Ah oui, de quel côté ? » J’affûte chacun de mes mots. « Au bord de la Tamise. Là, contente ? – Tu la remontais, ou tu la redescenda­is ? » Je laisse un moment passer. « Qu’est-ce que ça peut faire? » Dans le dessin animé, il y a une explosion. Maman

s’adresse à ma soeur : « Éteins-moi ça et ferme la porte derrière toi, Sharon. – C’est pas juste ! C’est Holly qui se fait gronder, pas moi! – Allez, file, Sharon. Et toi aussi, Jacko, tu pr… » Mais Jacko a déjà disparu. Une fois Sharon partie, Maman reprend les hostilités : « Et donc tu étais toute seule, pendant cette soi-disant promenade? » Pourquoi j’ai cette impression qu’elle cherche à me piéger ? « C’est ça. – Et quelle distance t’a fait parcourir cette petite balade en solitaire, dis-moi? – Quoi… en miles, en kilomètres ? – Je ne sais pas, moi, peut-être que ta promenade t’a poussée jusqu’à Peacock Street, chez un certain Vincent Costello? » Tout se met à tournoyer dans la cuisine ; par la fenêtre, sur la rive du côté de l’Essex, un minuscule bonhomme soulève son vélo et descend du ferry. « Alors, tu as perdu ta langue ? Attends, je vais te rafraîchir la mémoire : hier soir à dix heures, tu fermais les volets de la fenêtre de devant, et à part un t-shirt, tu n’avais pas grand-chose sur le dos. » Oui, j’étais descendue chercher une bière pour Vinny. Oui, j’avais fermé les volets du salon. Et, oui, quelqu’un était passé juste à ce moment-là. Du calme, m’étaisje alors rassurée, quelles sont les chances qu’un inconnu me reconnaiss­e? Si Maman s’imagine que je vais m’effondrer, elle peut toujours courir. « Tu gâches ton talent dans ce pub, Maman. Tu devrais bosser aux services secrets comme chef indics. » Mme Kath Sykes me lance son regard de tueuse. « Quel âge il a ? » Je croise les bras. « C’est pas tes oignons. » Maman plisse les yeux. « Vingt-quatre, on m’a dit. – Si tu sais, pourquoi tu me demandes ? – Parce qu’un type de vingt-quatre ans n’a pas le droit de fricoter avec une collégienn­e de quinze ans. Il pourrait se retrouver en prison. – J’aurai seize ans en septembre. Et puis la police a d’autres chats à fouetter, si tu veux mon avis. Je suis assez grande pour fréquenter qui je veux. » Maman allume une de ses Marlboro rouge. Je meurs d’envie de lui en piquer une. « Quand je vais raconter ça à ton père, il va lui flanquer une dérouillée, à ton Costello. » D’accord, Papa sait mettre à la porte les types bourrés quand c’est nécessaire, comme tous les patrons de pub, mais il n’est pas du genre à flanquer des dérouillée­s à tour de bras. « Brendan avait quinze ans quand il sortait avec Mandy Fry, et si tu crois qu’ils ne faisaient que se tenir la main, tu te trompes. Pour autant que je me souvienne, il n’y a pas eu droit, lui, au coup de la prison. » Elle articule exagérémen­t, comme si j’étais débile. « C’est un garçon, ça n’a rien à voir. » Je riposte par un ricanement, genre : C’est quoi, cet argument pourri? « Je te préviens, Holly, si tu veux revoir ce… vendeur de voitures, il faudra me passer sur le corps. – Tu sais quoi, Maman? Je vais avec qui je veux! – Bon, voilà comment ça va se passer. » Maman écrase sa clope. « Je te déposerai le matin au lycée avec la camionnett­e et je te ramènerai le soir. Plus question que tu sortes, sauf si tu es accompagné­e par moi, ton père, Brendan ou Ruth. Si jamais je vois ce salopard dans les parages, j’appellerai les flics et je porterai plainte – compte sur moi. Et je téléphoner­ai – écoute-moi bien – je téléphoner­ai à son patron pour qu’à son boulot, tout le monde sache qu’il cavale après les mineures. » De grosses secondes s’écoulent, le temps que j’accuse le coup. Mes glandes lacrymales me chatouille­nt, mais pas question que Mme Hitler ait ce plaisir. « On n’est pas en Arabie Saoudite ! Tu n’as pas le droit de m’enfermer ! – Tu vis sous notre toit, alors tu obéis. Quand moi, j’avais ton âge… – Oui, oui, je sais. Tu avais une vingtaine de frères, une trentaine de soeurs, quarante grands-parents, et vingt hectares de champs de patates à cultiver, parce que, oui m’dame, la vie était dure dans c’te bonne vieille Irlande. Mais figure-toi qu’ici c’est l’Angleterre, Maman, l’Angleterre! Et on est dans les années quatreving­t, alors si c’était tellement le pied, West Cork et ton trou paumé, on se demande bien ce que tu es venue foutre… » Vlan! Gifle sur la joue gauche. On se regarde : moi qui tremble, sous le choc, et elle, plus furax que jamais, et qui, je crois bien, comprend qu’un truc est cassé pour de bon. Je quitte la pièce sans un mot, comme si je sortais victorieus­e d’une dispute.

Je pleure, mais rien qu’un peu : c’est dû au choc, rien à voir avec du chagrin; quand c’est terminé, je me plante devant le miroir. Mes yeux sont légèrement bouffis, mais un peu de mascara, et c’est réglé… Une touche de rouge à lèvres, un coup de blush… et voilà. La fille du miroir, c’est une femme aux cheveux courts qui porte un t-shirt Quadrophen­ia et un jean noir. « Devine quoi, m’annonce-t-elle. Tu emménages chez Vinny aujourd’hui. » Je dresse la liste des raisons qui me font dire que c’est impossible, et je m’arrête. « D’accord », je réponds, à la fois excitée et calme. Et du même coup, j’abandonne l’école. Dès maintenant. Le temps que le conseiller d’éducation se bouge le cul, ce sera déjà les vacances, puis quand viendra septembre, j’aurai seize ans, et là, tout le bahut de Windmill Hill pourra bien aller se faire voir. Alors, chiche? Chiche. J’ai mes affaires à préparer. Ce que j’emporte? Ce qui tiendra dans mon grand sac de sport. Des culottes, des soutifs, mon bomber, ma trousse de

maquillage et la boîte Maggi dans laquelle je range mes bracelets et colliers. Du dentifrice et une poignée de tampons – mes règles sont un poil en retard : elles peuvent arriver n’importe quand. De l’argent. En comptant les billets et les pièces, j’arrive à treize livres quatre-vingt-cinq. Plus les quatre-vingts de mon compte TSB. Vinny ne me demandera pas de loyer, non plus, et de toute façon, dès la semaine prochaine, je chercherai du boulot. Du baby-sitting, travailler sur les marchés ou comme serveuse : il y a plein de façons de gagner un peu de sous. Et mes albums? Pas possible de ramener toute ma collec’ à Peacock Street, mais comme j’imagine bien Maman se venger en l’offrant à la première associatio­n caritative venue, j’emporte Fear of Music, que j’enveloppe soigneusem­ent dans mon bomber et range dans mon sac en veillant à ce qu’il ne se torde pas. Je cache les autres disques sous le plancher (il y a une latte qui ne tient pas) en attendant ; mais au moment où je remets la moquette en place, j’ai la peur de ma vie : dans le couloir, Jacko me regarde. Il est encore dans son pyjama et ses chaussons Les Sentinelle­s de l’air. « Dis donc, petit monsieur, tu sais que j’ai failli avoir une crise cardiaque? – Tu pars. » Il a la voix de quand il n’est pas tout à fait avec nous. « Exact, mais chut ! C’est un secret, hein. Je ne vais pas loin, ne t’en fais pas. – Je t’ai fabriqué un souvenir, pour que tu ne m’oublies pas. » Jacko me tend un disque de carton, une boîte de Vache qui rit aplatie sur laquelle il a dessiné un labyrinthe. Il est fana de labyrinthe­s, Jacko : ça doit être à cause de tous ces bouquins de Donjons et Dragons que lui et Sharon lisent. Celui-ci, composé de huit ou neuf cercles concentriq­ues, est plutôt simple par rapport à ceux qu’il fait d’habitude. « Prends-le, il me demande. Celui-ci est méphistoph­élique. – Il ne m’a pas l’air si terrible. – “Méphistoph­élique” signifie “diabolique”, grande soeur. – Qu’est-ce qu’il a de si diabolique, ton labyrinthe ? – Le Vêpre te suivra quand tu le parcourras. Si jamais le Vêpre te touche, tu cesseras d’exister. Un seul faux pas, et c’en sera fini de toi. Voilà pourquoi tu devras connaître le labyrinthe par coeur. » Purée, il est sacrément flippant, mon petit frère. « D’accord. Euh, merci Jacko. Bon, j’ai quelques trucs à… » Jacko m’attrape le poignet. « Mémorise bien le trajet par coeur, Holly. Fais plaisir à ton petit frère flippant. Je t’en prie. » Sa réplique me perturbe. « Tu te comportes un peu bizarremen­t, mon bonhomme. – Promets-moi que tu apprendras à t’orienter, de sorte que si jamais tu devais en arpenter les allées dans le noir, tu retrouvera­is la sortie. S’il te plaît ! » Les petits frères de mes amis sont plutôt du genre circuits de voitures électrique­s, vélocross ou cartes magiques. Pourquoi le mien fait des trucs bizarres et utilise des mots comme « arpenter » et « méphistoph­élique » ? Dieu sait comment il survivra à Gravesend s’il est pédé. Je lui ébouriffe les cheveux. « D’accord. Je l’apprendrai par coeur, ton labyrinthe, je te le promets. » Alors Jacko me serre dans ses bras, chose étrange, car Jacko n’est pas très câlin. « Hé, je ne pars pas très loin, tu sais… Tu comprendra­s quand tu seras plus grand, et puis… – Tu emménages chez ton petit ami. » De sa part, ça ne devrait plus me surprendre. « Ouais. – Prends soin de toi, Holly. – Il est sympa, Vinny. Quand Maman aura accusé le coup, on se retrouvera. Brendan s’est bien marié avec Ruth, mais ça ne nous a pas empêchés de le revoir, pas vrai ? » Sur ce, Jacko fourre le couvercle en carton sur lequel il a dessiné son labyrinthe au fond de mon sac de sport, me lance un dernier regard, et disparaît.

Un panier de serviettes de bar dans les bras, Maman surgit sur le palier du premier, comme si elle ne m’avait pas guettée. « Je ne plaisante pas. Je t’ai interdit de sortir. Retourne là-haut. Tu as des contrôles la semaine prochaine. Il est plus que temps que tu te mettes à tes révisions. » J’attrape la rampe. « “Tu vis sous notre toit, alors tu obéis”, tu disais. D’accord. Eh bien je n’en veux plus de tout ça, vivre sous ton toit, t’obéir ou me ramasser des coups dès que tu pètes les plombs. Toi-même, à ma place, tu n’accepterai­s pas tout ça. Je me trompe? » Le visage de Maman frémit; si elle prononce les bonnes paroles maintenant, alors on pourra discuter. Mais non : elle remarque mon sac de sport et ricane, genre elle n’en revient pas à quel point je suis bête. « Tu avais un peu plus de jugeote, avant. » Je continue de descendre jusqu’au rez-de-chaussée. Derrière moi, sa voix se crispe. « Et le lycée, alors? – Vas-y, toi, si c’est si important ! – Je n’ai jamais eu cette chance, moi, Holly. Il fallait que je fasse tourner le pub, que je vous nourrisse, toi, Brendan, Sharon, Jacko, que je vous habille et vous envoie à l’école pour que vous n’ayez pas à passer votre vie à nettoyer des W-C, à vider des cendriers, à vous esquinter le dos sans jamais avoir une soirée de libre. » Ça rentre par une oreille et ça sort par l’autre. Je poursuis ma descente. « Mais va. Va, fais-toi ta propre expérience. Je ne te donne pas trois jours avant que ton Roméo te fiche à la porte. Ce n’est pas pour leur incroyable personnali­té que les hommes s’intéressen­t aux filles, Holly. Ce n’est jamais pour ça. »

 ??  ?? L’Ame des horloges (The Bone Clocks) par David Mitchell, traduit de l’anglais par Manuel Berri, 784 p., 25 € Copyright Editions de l’Olivier. En librairie le 6 avril.
L’Ame des horloges (The Bone Clocks) par David Mitchell, traduit de l’anglais par Manuel Berri, 784 p., 25 € Copyright Editions de l’Olivier. En librairie le 6 avril.

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