Béatification
Nous avons tous encore à l’oreille la voix de Malraux invitant le héros et martyr de la Résistance Jean Moulin à entrer au Panthéon. Grâce au théâtre et à l’auteur Jean-Marie Besset, place à la voix douloureuse, passionnée et indomptable du chef de la Résistance lui-même.
L’épreuve de Jean Moulin, Evangile n’était pas gagnée d’avance. Tant de personnages de l’Histoire ont été trahis voire ridiculisés en ressuscitant sur scène. Le dramaturge a parfaitement évité le piège de la prosternation devant Moulin qui n’était d’abord qu’un homme d’une quarantaine d’années ayant au coeur un amour immodéré de la France et de la Liberté. Au début de la représentation, on redoute le parti-pris de l’auteur qui, en découpant le destin du fameux résistant en séquences, risquait de transformer cette tragédie en bande dessinée. Mais non : c’est un Jean Moulin présent, vivant, ardent qui apparaît face aux querelles politiciennes de la Résistance ; face à Frenay, Brossolette, de Bénouville ; face à René Hardy le Judas, à Klaus Barbie le bourreau. Et face à de Gaulle, le chef.
Malgré le titre pieux, ce n’est pas une légende dorée que Besset nous raconte mais une histoire d’hommes ayant peur de souffrir et de mourir. Voilà un passionnant et bouleversant spectacle. Les acteurs, non pas des vedettes, sont de jeunes comédiens pleins d’une humilité bienvenue. Et particulièrement Arnaud Denis en Jean Moulin de chair et de feu, Chloé Lambert interprétant sa soeur Laure et un de Gaulle, Stephane Dausse, impressionnant. Comme il se doit…