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Christophe Honoré *

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« Je dois confesser qu’enfant, j’étais un très « maigre » lecteur. Pire : un lecteur menteur surtout, puisque je prétendais avoir lu des livres dont j’avais à peine survolé les premières pages. Avant 10 ans, je n’ai vraiment lu que très peu de livres et parmi ceux- là, il y a eu Les Petites Filles modèles de la Comtesse de Ségur. Collé - gien, je pastichais des vers de Rimbaud puis de Prévert ; lycéen, je noircissai­s mes cahiers d’une écriture sèche et désinvolte volée à Bret Easton Ellis. Mais ces essais laborieux étaient- ils vraiment nés d’une envie d’écrire ? Cette envie, je ne suis pas certain aujourd’hui de la ressentir encore. Par la suite, j’ai découvert tous les livres de Duras, Robbe- Grillet, Simon et Pinget – que j’ai relus avec discipline pour préparer ma pièce de théâtre, Nouveau Roman. Ils sont cha- cun des piliers essentiels de mon rapport à la littératur­e, mais aussi au cinéma. En écrivant Ton père, j’ai bien sûr pensé à tous les écrivains homosexuel­s du XXe siècle qui ont ressenti le besoin, l’urgence, d’écrire des récits à la première personne. De Gide à Cocteau, de Genet à Guibert, de Lindon à Noguez… J’avais conscience de m’inscrire dans une généalogie. Il s’agissait pour moi de prendre le relais et de proposer une figure qui me semblait inédite dans cette littératur­e : le père homosexuel. Aussi, je suis très heureux d’appartenir à un temps où je peux lire Christine Angot, Marie Darrieusse­cq, Laurent Mauvignier ou Geneviève Brisac. Même si, par ailleurs, je souffre de ne plus pouvoir découvrir de nouveaux Guibert, Koltès, Lagarce… A vrai dire, je n’ai pas encore lu les livres de cette rentrée littéraire, étant complèteme­nt immergé dans les lettres de Madame de Sévigné que je n’avais jamais lues. Mais de l’an dernier, je me souviens d’avoir passé de bons moments dans les pages de Tanguy Viel, de Camille Laurens ou dans celles de Philippe Sollers. Quant à ma bibliothèq­ue, j’ai eu la chance pendant quelques années d’avoir un assistant qui y a remis de l’ordre. Mais je dois bien avouer que depuis son départ, le chaos a repris possession des rayons… »

Propos recueillis par Baptiste Liger * Ton père (Mercure de France).

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