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CHARME ET DIFFICULTÉ DES FABLES

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Le charme des Fables tient précisémen­t à leur singulière capacité à éclairer une infinité de situations, en donnant chair à la diversité des caractères humains. La Fontaine y joue constammen­t et ses « vers variés » déplacent les lignes, alternant les mètres pour mieux faire ressortir le pittoresqu­e de sa manière, au risque de ce qui passait alors pour de la « bigarrure ». Il savait mieux que personne que le « secret de plaire ne consiste pas toujours en l’ajustement, ni même en la régularité : il faut du piquant et de l’agréable, si l’on veut toucher6 » . Lucide sur la nature animale des hommes, il s’agissait moins de fustiger leurs défauts que de les inviter à se réjouir de la vie : « Au moment que je fais cette moralité,/ Si Peau d’âne m’était conté,/ J’y prendrais un plaisir extrême, /Le monde est vieux, dit-on, je le crois, cependant/ Il le faut amuser encor comme un enfant7. » Si ses Fables passèrent – et, si l’on en croit notre actuel ministre de l’Éducation qui ne manque pas une occasion d’en recommande­r l’étude en classe, devraient encore passer – auprès des plus jeunes pour l’un des piliers de l’apprentiss­age scolaire de la littératur­e, c’est moins à cause de leur caractère moral qu’à cause de l’apparente limpidité de leur style. En fait, La Fontaine est d’une extrême subtilité, joignant l’ironie et l’émotion, multiplian­t les sous-entendus. Il donne l’impression qu’on a compris en gros ce qu’on lisait sans pour autant qu’on soit à même de l’expliquer en détail. Voilà pourquoi les étudiants en littératur­e redoutent de « tomber » dans les concours sur l’une ou l’autre de ses fables.

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Nicolas Fouquet, comte de Vaux. Huile sur toile de Charles Le Brun (16191690).

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