Sous les pavés, les flics
Plusieurs ouvrages, écrits à la fois par des gardiens de la paix, mais aussi des journalistes et des universitaires, permettent de se faire une idée plus précise de l’institution policière.
Nos représentants des forces de l’ordre sont-ils des monstres racistes ou bien des hommes et des femmes au bout du rouleau, en grande souffrance professionnelle ? Le débat fait rage, à l’heure où les scandales liés aux violences policières ont mis en émoi une partie de la population française. Pour nous aider à y voir plus clair, trois livres, brillants, paraissent en ce début d’année 2018.
À commencer par l’enquête de JeanMarie Godard, Paroles de flics ( Fayard). Après avoir longtemps épinglé les « dérapages » des flics au cours des manifestations, le journaliste a décidé d’aller à la rencontre de ces policiers cachés derrière leurs casques et leurs boucliers. Ce qu’il a découvert est désespérant : méprisés par leur hiérarchie, mal payés, envoyés sur des zones violentes sans formation, soumis à la politique du chiffre, souvent agressés, ils sont aujourd’hui au bord du burn out. Son enquête, vivante et détaillée, le prouve à de multiples reprises.
A contrario, le livre des chercheurs Fabien Jobard et Jérémie Gauthier, sobrement intitulé Police ( PUF), est un concentré de violentes critiques à l’égard de la profession. Les textes qu’il contient, « produit d’enquêtes et de réflexions de politistes, de sociologues et de juristes sur les questions sensibles auxquelles font face la police française », n’hésitent pas à présenter cette dernière comme raciste, viriliste, paternaliste à l’égard de la population des quartiers dits sensibles, et incapable de penser son rapport aux gouvernés autrement que par la force.
FAIBLESSE HUMAINE
Face à ces deux propos très opposés, le premier roman d’Alex Laloue et Marie Talvat, eux-mêmes respectivement policier et journaliste, apporte son lot de nuances bienvenues. Comme des bleus (Plon) met en scène des flics du 36 quai des Orfèvres aux prises avec un meurtrier sanguinaire et introuvable. Arsène, dernier arrivé dans la grande famille de « la Crim », encaisse avec difficulté la violence du métier. Un soir, il finit par se confier à une belle journaliste un peu trop bavarde… Dans ce roman survolté et choral, aux dialogues savoureux, la police n’est ni ange ni démon, mais bien les deux à la fois. Paniquée et rigoureuse, morale et impitoyable, flirtant toujours avec la folie. Bref, humaine, trop humaine. Lou-Ève Popper
À la rencontre de ces policiers cachés derrière leurs casques et leurs boucliers