PHILIPPE LYON.
Noir bien serré
Le face- à- face enquêteur/ suspect est un code basique, dans le polar. Et il ne vaut que s’il nous mène aux zones d’ombre des personnages. Il en va ainsi de celui qui oppose Manuel Kross, vingt-cinq ans de carrière dans la police judiciaire, capitaine 5e échelon, à Ari Zeller, légende noire du grand banditisme. En découvrant deux cadavres d’hommes tués à coups de pied et de poing, Kross ne se doute pas qu’il vient de secouer une toile d’araignée mafieuse, qui l’entraîne sur la piste de dresseurs de pitbulls, de revendeurs d’armes de guerre, de passionnés d’arts martiaux et de free fight, de culturistes obsessionnels. Dans cette enquête entièrement basée à Paris, Kross a toujours un coup de retard, car bien des trafics se déroulent aussi sur le darknet. Cet épais polar est une course-poursuite qui obéit aux codes du genre, tout en proposant un portrait de cette génération qui se pique de catch et adore Mortal Kombat. Ajoutez-y un Kross au coeur et à l’âme aussi tannés qu’un vieux cuir, fasciné par l’obscur, mais amoureux fou de sa femme – faites bien attention à cette voix qui s’immisce entre deux chapitres. Premier roman de Philippe Lyon – par ailleurs scénariste –, cette OEuvre noire, aux relents rouge sang, souffre de longueurs, mais reste une déambulation marquante par son noir ultraréaliste et sa langue.
L’OEuvre noire par Philippe Lyon, 480 p, Calmann-Lévy, 19,90 E