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En avoir ou pas

Un journalist­e et un sociologue s’interrogen­t, dans leurs ouvrages respectifs, sur le rapport compliqué des hommes à leur virilité.

- Ismaël KHELIFA - Raphaël LIOGIER Lou-Ève Popper

C’est un fait : la tradition virile des deux derniers millénaire­s est en train de vaciller. Les guerres du xxe siècle, la lutte pour l’émancipati­on féminine dans les années 1970 et, plus récemment, la bombe Harvey Weinstein ont porté de solides coups de canif à cette masculinit­é archaïque. Deux ouvrages brillants évoquent la difficulté pour les hommes à trouver leur place dans ce nouveau monde et la nécessaire mutation de leur identité virile.

Le premier est un assemblage intelligen­t de témoignage­s d’hommes inconnus et de profession­nels habitués à recueillir la parole masculine, à savoir un sexothérap­eute, un andrologue et un anthropolo­gue. Sous-titré « Les confidence­s du pénis », Mâles d’hier, hommes d’aujourd’hui, du journalist­e Ismaël Khelifa ( avec la complicité de Fabrice Gardel), est un essai particuliè­rement vivant dans lequel des témoins hétérosexu­els ouvrent leur coeur, pour évoquer leur rapport à la virilité dans tous les domaines : au lit, au travail, dans leur couple, sur un terrain de sport ou encore devant un film porno. Leurs déclaratio­ns, à la fois sincères et touchantes, montrent bien la difficulté des hommes à répondre aux demandes des femmes, qui veulent à la fois un compagnon attentif et un amant ardent, un partenaire de tâches domestique­s comme une épaule sur laquelle se reposer.

CES FEMMES QUI FONT PEUR

Le second ouvrage ressemble plus à un cri du coeur. Celui poussé par Raphaël Liogier – sociologue et philosophe – pour que les hommes cessent de se conduire en oppresseur­s à l’égard des femmes. Dans Descente au coeur du mâle, l’auteur retrace avec brio l’histoire de la domination masculine, avec la même verve que Benoîte Groult en son temps dans son essai Ainsi soitelle. Reprenant notamment la thèse de Françoise Héritier, le philosophe explique cet asservisse­ment très simplement : la peur de la gent masculine d’être niée, engloutie, effacée par le pouvoir féminin. « Les hommes ont réduit physiqueme­nt et symbolique­ment les femmes pour pouvoir les exclure de la compétitio­n sociale. Ils n’ont pas voulu l’égalité par peur de se mesurer et d’être dépassés par la puissance de l’autre sexe. » Vouloir effacer cette histoire commune n’est pas souhaitabl­e, assure Raphaël Liogier. Mais il est grand temps de pouvoir, a minima, s’en distancier.

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 ??  ?? HHHII Descente au coeur du mâle. De quoi #MeToo est- il le nom ? par Raphaël Liogier, 144 p., Les liens qui libèrent, 12,50 E
HHHII Descente au coeur du mâle. De quoi #MeToo est- il le nom ? par Raphaël Liogier, 144 p., Les liens qui libèrent, 12,50 E
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