Au nom de la loi
Une critique en bonne et due forme de la soumission aux droits de l’homme.
Spécialiste de la genèse de la philosophie politique moderne, et en particulier de la tradition libérale et de Tocqueville, Pierre Manent se livre ici à une critique des droits de l’homme devenus, malheureusement à ses yeux, la référence ultime de toute légitimité dans nos sociétés démocratiques, avec cette conséquence que la loi n’aurait plus pour fonction de commander mais d’autoriser. Conformément à la conception moderne du droit, l’État moderne entend désormais codifier un monde humain sans loi ni règle. Et dès lors que la détermination de la nature de l’homme réduit ce dernier à n’être qu’une machine désirante, s’efforçant de persévérer dans l’être, la notion de liberté n’aurait plus d’autre sens que la suppression des obstacles qui s’opposent à son déploiement ou qui l’entravent. Le discours des droits individuels revient à une autorisation illimitée à des actions ou conduites sans règle ni finalité, et « la grammaire de la vie humaine est réduite pour nous au pâtir et au jouir ».
C’est peu dire que Pierre Manent a quelques réserves à l’égard de la loi sur le « mariage pour tous », tant elle lui semble aller contre le « sens commun » . L’ouverture du mariage aux personnes de même sexe n’est toutefois à ses yeux que l’une des manifestations, parmi d’autres, d’une tendance générale de nos sociétés à organiser le monde humain indépendamment de toute référence à un ordre naturel. La Loi naturelle et les droits de l’homme est certes un livre résolument réactionnaire mais stimulant, quand bien même on ne partage ni les nostalgies de l’auteur ni ses préventions à l’égard de l’idée de progrès et d’émancipation du siècle des Lumières !