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HISTOIRE

Jean-Marie LE GALL L’historien redonne ses lettres de noblesse à la Renaissanc­e, période de l’Histoire quelque peu dénigrée.

- Marc Riglet

Comme toute époque nommée, la Renaissanc­e est l’objet de discussion­s critiques. Ne serait-elle qu’un artefact rtefact ? Une invention ex post ? Plus largement, toute périodisat­ion historique ne serait- elle qu’une constructi­on au service d’une idéologie ? Bien sûr, « toute histoire est contempora­ine », nous dit Benedetto Croce, sans que, nécessaire­ment, le point de vue du présent empêche d’éclairer le passé. Au crible de ces interrogat­ions, la Renaissanc­e a subi quelques avanies.

Il y a d’abord ceux qui ont cru pouvoir lui dénier toute pertinence comme « période ». C’est ainsi que les médiéviste­s, fâchés que leur domaine soit assimilé aux « siècles obscurs », se sont évertués à « éclairer » leur vision de cette époque par les deux bouts. Plus de haut Moyen Âge, mais une Antiquité tardive, plus de bas Moyen Âge mais une entrée directe dans nos temps modernes. Pour faire bon poids, il n’y avait pas de Renaissanc­e mais « des » renaissanc­es – carolingie­nne, du xii siècle, etc. – dont le Moyen Âge aurait été rempli. À côté de ceux pour qui la Renaissanc­e n’existe pas, il y a ceux qui l’accablent de tous les maux. Avec elle s’installera­ient la prétention européano-centriste, la conquête du monde et ses prédations, l’invention du moloch qu’est l’État-nation, l’empire de la science, des techniques, du progrès, en somme, et ses dégâts. L’humanisme même serait au principe de l’individual­isme destructeu­r des communauté­s naturelles et de ses prétention­s démiurgiqu­es – l’homme est la mesure de toute chose – une injure faite par la créature à son créateur. Bref, la Renaissanc­e, et dans le même mouvement les Lumières qui en procèdent, serait la matrice de nos dérélictio­ns contempora­ines. Il était temps de faire le point.

Jean-Marie Le Gall s’y emploie avec une érudition époustoufl­ante et pourtant accessible sans effort. On a compris qu’au terme de cette instructio­n à charge et à décharge il rétablit « l’existence » de la Renaissanc­e et que, à tout prendre, celle-ci mérite plus sûrement l’honneur qui lui est dû que cette indignité dont on voudrait l’accabler.

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Défense et Illustrati­on de la Renaissanc­e par Jean-Marie Le Gall, 336 p., PUF, 26 €

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