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Pierre-François Lardet, l’inventeur du Banania

La marque a 104 ans, mais personne n’avait encore écrit ses Mémoires. C’est chose faite avec ce récit épique très documenté.

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Dans la réalité, il s’appelait Pierre- François Lardet. Journalist­e de profession, il est envoyé en Argentine pour couvrir l’inaugurati­on du nouvel opéra de la capitale d’un pays décrit comme celui « des conquérant­s et des entreprene­urs ». Sur le chemin du retour, cet infatigabl­e voyageur est passé par le Brésil et le Nicaragua alors en pleine guerre civile. Ayant trouvé refuge dans un village indien, Lardet y découvre un breuvage préparé à partir de farine de banane, de cacao, de sucre et de céréales pilées. De retour en France peu avant le début de la

Grande Guerre, il va s’escrimer à imiter, réinventer, puis finalement breveter la « boisson ». Le 31 août 1914, la marque Banania est déposée, l’entreprise est créée, un mythe est né.

Dans Le Roi chocolat, de Thierry Montoriol, il s’appelle Pierre- Victor Lardet, dit « Victor ». Ce pas de côté est une des rares libertés prises par l’auteur, qui revendique avoir voulu « identifier au plus près la personnali­té de [son] aïeul ». Car Thierry Montoriol est, en effet, l’arrière-petit-fils de l’inventeur ! Ancien grand reporter pour la revue Bateaux, mais aussi pour Le Point ou Le Parisien, le tout frais sexagénair­e n’a pu commencer le chantier que lorsque sa mère, petite-fille Lardet, a consenti à lui parler de l’ancêtre. Une mère qui déménageai­t durant la même période. En l’aidant, le romancier est tombé sur un carton contenant quelques carnets de moleskine, les rares journaux intime de « Victor », constituan­t un des ponts narratifs du livre. Un roman sur Banania ? Oui, mais c’est bien plus que cela. Y sont racontés l’histoire d’un homme, d’une marque, et celle d’une époque avec les derniers Aztèques, la révolution zapatiste et les trafics d’armes. L’auteur y décrit ensuite l’essor de Banania (et la façon dont fut trouvé le fameux « Y’a bon » ), jusqu’à la chute d’un empire, dans les malversati­ons du capitalism­e boursier naissant. Au centre : les « inventions » de Victor. Dans son quatrième roman, Thierry Montoriol lie l’aventure à la tragédie, la passion à la Realpoliti­k, et secoue par ses clins d’oeil à notre époque. Hubert Artus

HHHHI Le Roi Chocolat par Thierry Montoriol,

432 p, Gaïa, 22 €

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