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Variations parisienne­s

Frantz Duchazeau dresse un portrait vibrant de l’audacieux génie lors de son passage dans la Ville Lumière.

- Pascal Ory

I el y a un an, Clément Oubrerie nous faisait le cadeau d’un très jouissif Voltaire amoureux. Aujourd’hui, c’est au tour de Frantz Duchazeau de nous proposer de suivre Mozart à Paris. On peut y voir un indice : l’humeur présente étant fort massacrant­e et le xx siècle nous ayant abreuvés – à lire les auteurs de bande dessinée, mais pas que – de catastroph­es en tout genre, la légèreté et l’impertinen­ce du siècle des Lumières se révèlent une élégante manière de parler d’amour, de création et de liberté. Aux monstruosi­tés collective­s, cette mythologie – puisque c’en est une – substitue des aventures individuel­les où l’intelligen­ce et l’énergie apportent une solution aux malheurs des temps, réduits à l’état de malheurs des hommes.

SOUS LES PERRUQUES POUDRÉES

Notre Wolfgang Amadeus est ici saisi lors des quelques mois où il séjourne à Paris avec le projet d’y trouver enfin un statut moins humiliant que sous son ancien protecteur, l’archevêque de Salzbourg. Impétueux et fantaisist­e, il souffre d’être enfermé par son entourage dans le rôle d’enfant prodige, alors qu’il est désormais un jeune adulte sûr de ses désirs et, plutôt qu’un virtuose de salon, un compositeu­r conscient de ses talents supérieurs, un de ces êtres pour lesquels l’époque vient d’inventer un mot dont elle finira par le gratifier : un « génie ».

Sous les perruques poudrées et la politesse du ton, percent aisément l’arrogance des dominants, l’opportunis­me des dominés et l’égoïsme des faux amis. La petite musique des convenance­s tourne à la tragédie quand la « chère petite maman » de Mozart meurt loin du pays natal et que la belle Aloysia, dont l’image obsède son amoureux, se tourne vers un autre. Mais le dernier mot s’apparente au « Viva la libertà ! » du Don Juan, quand notre héros réussit, à ses risques et périls, à s’affranchir de toutes ses tutelles. Pour nous raconter cette fable, Duchazeau sait mettre le ton, et la main suit, vive, nerveuse : allegro ma non troppo.

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 ??  ?? HHHHI Mozart à Paris par Frantz Duchazeau, 96 p., Casterman, 18,95 €
HHHHI Mozart à Paris par Frantz Duchazeau, 96 p., Casterman, 18,95 €

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