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La douleur des sentiments

Et dire que, dans sa jeunesse, Pauline Delabroy-Allard se cachait pour écrire ! Son magnifique premier roman sur une passion amoureuse a, entre autres, remporté le prix du Style.

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La dernière recrue des éditions de Minuit se nomme Pauline Delabroy- Allard. Ça raconte Sarah, son coup d’essai romanesque, reste l’un des titres les plus marquants de l’année. Mais comment ne pas être bouleversé par cette histoire d’amour tragique entre deux femmes ? Cette jeune professeur­e et documental­iste dans un grand lycée de banlieue a commencé à écrire à l’adolescenc­e, par le biais d’un journal intime qu’elle n’a jamais laissé tomber, puis en rédigeant « pas mal de poèmes en vers libres ».

UNE ENVIE DE PASSION

Des livres, il n’en manque pas chez elle ! Sa mère est une grande fervente de littératur­e étrangère. Son père, professeur de littératur­e comparée, a publié deux ouvrages chez Verticales. Elle n’a lu que le premier, garde le second pour plus tard. Après avoir tenu un blog d’autofictio­n, Pauline Delabroy-Allard ressent l’envie de raconter une passion. Elle n’en parle à personne. S’y attelle chez elle le matin, avant le réveil de sa fille, puis au cours de deux séjours dans des maisons prêtées pour les vacances. L’ensemble lui prend un an. Elle corrige, imprime puis range le manuscrit : l’édition, elle sait ce que c’est pour avoir fait un stage chez Gallimard pendant son master d’édition et de librairie. Minuit, qui l’accueille, publie Echenoz, pour lequel elle avoue « une énorme admiration », Tanguy Viel et Julia Deck. « Dingue » de la nouvelle vague, l’auteure raffole de Lubitsch et de Lang, tout en incitant à aller voir L’Amour flou de Romane Bohringer et Philippe Rebbot. Parmi ses écrivains de chevet, elle cite Henri Michaux, fascinant parce qu’ « il sait tout faire », le Georges Perec de La Vie mode d’emploi qui l’a « retournée » et de W qu’elle place au-dessus de tout, qu’elle a lu et relu. Sans oublier Claude Simon, Hervé Guibert et Louis Aragon. Le succès de Ça raconte Sarah étonne Pauline Delabroy-Allard. Elle en parle comme d’un « brave petit texte » qui ne lui appartient plus, mais dont elle suit les étapes avec plaisir. Dans sa tête, elle a commencé quelque chose d’autre. Un roman qui ressembler­a à une enquête. Le prix Goncourt ne lui fait pas peur. « Ce serait bien que l’amour ait le prix ! » Au final, elle aura eu les lauriers des Goncourt suisse, polonais et roumain. À quand la France ?

Alexandre Fillon

● Ça raconte Sarah par Pauline Delabroy-Allard (Minuit)

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