3 QUESTIONS À... JAVIER CERCAS
LEMONARQUE DESOMBRES MARQUE-T-IL LA FIN D’UN CYCLE ?
Je crois que oui. Le cycle a commencé en 2001 avec Les Soldats de Salamine et se caractérise par des particularités qui étaient alors novatrices, mais dont j’ai maintenant l’impression qu’elles se sont répandues et qu’elles sont devenues la norme. En tout cas, quand j’ai terminé Le Monarque – qui était le premier livre que j’aie voulu écrire dans ma vie –, j’ai eu l’impression qu’en effet quelque chose s’achevait, et que si je continuais dans cette veine, je courrais le risque de me répéter : l’une des pires choses qui puissent arriver à un écrivain.
CE ROMAN A-T-IL ÉTÉ PLUS DIFFICILE À ÉCRIRE QUE VOS AUTRES LIVRES ?
Probablement, dans la mesure où, durant toute ma vie, j’ai essayé de l’écrire. De plus, il traite d’un thème à la fois très personnel, familial, le plus terrible héritage de ma famille : l’héritage de la guerre. Ce sont là, il me semble, les sujets les plus difficiles à aborder. C’est pourquoi j’ai tant tardé à écrire ce roman, comme si j’avais passé mon existence à me préparer à son écriture.
SUR QUOI TRAVAILLEZ-VOUS EN CE MOMENT ?
Sur un roman en tout point différent des précédents, et qui sera, je l’espère, parfaitement personnel et reconnaissable. Ce que réussissent les auteurs que j’aime, que je considère comme « grands » : être à la fois toujours différents et toujours eux-mêmes. En ce sens, il s’agit d’un travail totalement expérimental, puisque je n’ai jamais rien écrit de tel. Je souhaiterais aussi que ce soit un roman « populaire », afin d’y retranscrire une innocence que nous avons sans doute perdue. C’est difficile, et je n’y arriverai peut-être pas… Mais un écrivain qui ne prend pas de risque n’est pas un écrivain : c’est un scribe. Faulkner disait de nous, les auteurs, que, dans le meilleur des cas, nous pouvions aspirer à un « noble échec ».