RÉVÉLATIONS
PIERRE-HENRY GOMONT
● Malaterre (Dargaud) Une drôle d’histoire que celle du génial Malaterre, centrée sur un drôle de héros, dont le moins qu’on puisse dire est qu’il est fort éloigné du gendre idéal. Menteur jusqu’à la mythomanie, alcoolique jusqu’à l’autodestruction, Gabriel est plus flambeur que flamboyant, plus manipulateur que charmeur, mais les deux adolescents qu’il retire à sa femme pour les emmener en Afrique équatoriale en redemandent. Au fond, si le dessin et le verbe de Gomont confirment le talent de l’artiste, la principale qualité de cet album tient sans doute à l’ambiguïté du narrateur, fasciné par l’énergie négative qui émane de ce grand raté. Bref, un scénario si atypique dans l’univers aseptisé de la BD correcte qu’on se demande si l’auteur n’y a pas mis une dose d’autobiographie.
NORA KRUG
Heimat (Gallimard) ● Dessinatrice reconnue aux ÉtatsUnis, enseignante à la prestigieuse Parsons School de New York, Nora Krug est, par ailleurs, née en Allemagne. Depuis longtemps, elle est préoccupée par les « années noires » et la responsabilité éventuelle de sa famille qui, malheureusement pour son confort intellectuel, n’est pas une famille de victimes – ni, pour autant, une famille de bourreaux. Entre album de photographies et journal intime dessiné et coloré aux grâces enfantines, Heimat explore avec application une mémoire standard. Pardelà une enquête tenace, qui lui permet de découvrir une réalité moins simple et innocente qu’il n’y paraissait jusqu’alors, l’auteure se découvre surtout elle-même.