POLAR/ THRILLER
Croisant les intrigues criminelles, exhumant une Amérique profonde sous l’emprise du Ku Klux Klan avec un brio romanesque qui vaut ses mille pages, le livre de Greg Iles est l’un des polars majeurs de cette année.
En France, Brasier noir paraissait en mai 2018, c’est-à-dire peu ou prou au moment où était projeté, à Cannes, le film de Spike Lee intitulé BlacKkKlansman. Les deux oeuvres ont le même thème : le Ku Klux Klan et la permanence du racisme aux États-Unis.
Le roman de Greg Iles débute en 1964, à Natchez (Mississippi). Un jeune garçon noir et une riche blanche, fille d’un mafieux local, s’aiment. Cette relation va mettre le feu aux poudres : deux meurtres, un viol collectif et un brasier de haine entretenu par les Aigles bicéphales, une branche de dissidents ultra- violents du KKK. Après cette première partie saisissante, la seconde nous fait basculer en 2005, quand la mort d’une femme noire fait ressurgir les démons du passé. Le suspect est le docteur Tom Cage dont le fils, Penn, n’est autre que le narrateur du livre, devenu maire de Natchez, écartelé entre la recherche de la vérité et la volonté d’éviter la prison à son père. Le récit alterne avec cette intrigue contemporaine tout en éclairant les racines d’un mal aux ramifications raciales mais
aussi mafieuses : quel a été le rôle de Tom Cage, durant quarante ans, dans ce dispositif où le KKK est de mèche avec les « parrains » de la région ?
Le suspense est double, la construction impeccable, la galerie de personnages stupéfiante, la peinture du Deep South faulknérienne. Le tout vaut bien mille pages. Ça tombe bien : c’est le premier tome d’une trilogie dont le deuxième paraîtra le 2 janvier. Lorsqu’on sait que Greg Iles, reconnu outre-Atlantique, a commencé l’écriture de ce roman après un grave accident qui faillit lui coûter la vie en 2011, on mesure la puissance de cet ambitieux volume inaugural. ● Brasier noir par Greg Iles (Actes Sud/Actes Noirs)