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PASSAGE EN REVUES

- Louis-Henri de La Rochefouca­uld

Si elles ont perdu de leur prestige passé, les revues restent cependant « l’antichambr­e de la littératur­e » pour Jean-Baptiste Gendarme qui, comme Michel Crépu, continue de découvrir de nouveaux auteurs. Et de leur faire la part belle pour les lancer.

Actuel patron de la culte Nouvelle Revue française, Michel Crépu nous rappelle qu’il fut un temps, celui de l’entredeux-guerres, « où l’on disait qu’il y avait trois puissances en France : l’Église, l’armée et la NRF ». De 1829 (création de la Revue des Deux Mondes) jusqu’en 1965 (disparitio­n du Mercure de France), les revues littéraire­s étaient un passage obligé pour tout jeune plumitif. On se serait coupé un bras pour publier son premier texte dans certaines d’entre elles. Si cet âge d’or est derrière nous (on ne donnera pas les chiffres de ventes de L’Atelier du roman), la revue continue d’être une sorte de baptême. En 1995, Yann Moix publia un extrait de Jubilation­s

vers le ciel dans La Règle du jeu

avant de signer chez Grasset. Dans une interview à Décapage,

Emmanuel Carrère se souvenait que son tout premier texte avait paru en 1979 dans la revue de SF Fiction :

« Quand le rédacteur en chef de

Fiction, Daniel Riche, m’a téléphoné chez mes parents pour me dire qu’il prenait cette nouvelle que je lui avais envoyée, je me suis senti fier, cela va sans dire, mais aussi adoubé, reconnu, par le monde auquel je désirai appartenir. »

Malgré tout ce que l’on nous rabâche sur la crise du papier, l’undergroun­d littéraire fourmille de revues vivantes où aller sonner, que l’on ait une sensibilit­é de gauche ou de droite (Possession Immédiate, Raskar Kapac). Chez Gallimard, outre L’Infini de Sollers, demeure l’institutio­n NRF, qui continue de recevoir beaucoup de textes et de sortir de nouveaux auteurs, comme Frédéric Verger, qui y débuta avant de décrocher le Goncourt du premier roman pour Arden. Entre les deux, n’oublions pas Décapage (éditée par Flammarion). Par ailleurs romancier et éditeur chez Anne Carrière, son directeur Jean-Baptiste Gendarme raconte : « Je reçois une vingtaine de textes par semaine. Dans chaque numéro, dans la partie “création” essentiell­ement, nous publions un auteur qui n’a jamais publié. Ce sont ses débuts en littératur­e. C’est quand même le rôle de la revue : être l’antichambr­e de la littératur­e. On publie des auteurs édités, connus, ou moins connus, mais on doit aussi chercher les talents de demain. » Récemment, c’est ainsi qu’ont été découverts Clément Bénech, Romain Monnery ou Quentin Desauw, qui publie ce mois-ci son premier roman, Marée haute. « Les revues sont encore utiles. Je parie même sur le retour de la mode des revues littéraire­s. Les vinyles ont bien réussi leur come-back, pourquoi pas elles ? », conclut Jean-Baptiste Gendarme.

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