L’ombre du mâle
L’ idée de me faire tripoter le poil ne m’émeut guère. Pas plus que celle de soutenir une conversation convenue sur le temps, la dernière épidémie [...]. Raisons pour lesquelles je vais chez le coiffeur avec, « en poche », ma lecture en cours. Dernièrement, une jeune et sympathique coiffeuse me disait : « C’est rare de voir un homme qui lit. » Elle confirmait sans le savoir la réalité des statistiques : la testostérone n’est pas l’hormone de la lecture… Les filles lisent et travaillent. Les filles réussissent mieux dans les études ; médecine, droit, justice, enseignement : le « quarté » gagnant du vrai pouvoir.
Pendant ce temps, une part non négligeable de l’intellect mâle s’occupe de jeux vidéo et de sport avec, à son apogée, le commentaire sportif…, se satisfaisant de l’acceptation béate d’un discours inutile. Ressassant les tenants et les « abrutissants » du déroulement d’un match qui, au fond, n’est qu’un jeu de balle. Le jour de la comparaison, c’est-à-dire le jour de l’examen, la médiocrité se révèle douloureuse [...]. La lecture, ce moment de méditation de pleine inconscience, est à retrouver. Prendre son temps pour lire, réfléchir, peindre, se perdre dans la musique. Ce n’est pas en galopant après le mammouth que l’homme préhistorique a trouvé l’inspiration pour orner sa grotte de merveilles. Le navigateur, autrefois, emportait toute une bibliothèque et quand le flux et le reflux avaient cessé de l’amuser, il lisait…
Y a-t-il pour nous, les hommes, une autre alternative que le pessimisme ? Oui. Il faut relire, continuer à acheter dans une librairie un livre qui vous appelle alors que vingt autres attendent chez vous, en piles, d’être lus… Heureusement, parfois encore, les garçons passionnent les filles.