Nature et découvertes
Marc Jeanson et Serge Sanchez nous offrent deux beaux témoignages sur des amoureux de la faune et la flore.
Parmi les trésors que recèle la capitale, il en est un trop méconnu, qui continue pourtant de croître au détour d’une allée du Jardin des Plantes. Fruit de trois cent cinquante ans d’exploration, sur fond de conquêtes coloniales et de guerres commerciales, l’Herbier national regroupe près de huit millions de plantes patiemment cueillies, pressées et répertoriées par les « voyageurs », aux fondements de la botanique (Adanson, Linné, Lamarck, Poivre, Tournefort et consorts). Marc Jeanson, en digne héritier, leur rend un captivant hommage avec son livre Botaniste. Retraçant, en parallèle de son parcours, les périlleuses trajectoires entreprises par ses ancêtres – du Vieux Continent à l’île de Java, de Canton à l’Ouest américain –, l’auteur esquisse le vivant tableau d’une quête de connaissances se confondant avec l’histoire de l’humanité. Si les vols long-courriers ont remplacé les mois de navigation, l’oeil du défricheur reste l’outil
premier de l’ « inventeur de plantes ». Il est le témoin, à travers les âges, de la métamorphose des paysages et du bouleversement d’un écosystème plus que jamais menacé, alors qu’il reste encore tant à découvrir.
LE ZOO DES LETTRÉS
De l’herbier au bestiaire, il n’y a parfois qu’une allée à franchir. À rebours du chemin parcouru par notre botaniste, Serge Sanchez est passionné par le règne animal, avant qu’une « jungle lui pousse dans la tête » . Après avoir fureté dans « les objets de la littérature » avec son livre La Lampe de Proust (2013), il s’est intéressé au « zoo personnel de quelques auteurs et philosophes », de la mouche de Montaigne aux papillons de Nabokov. Savoureux condensé de ses recherches (parfois émaillées de conquêtes féminines), Le Homard de Flaubert illustre la fascination exercée sur les gens de lettres par toutes sortes de petites bêtes, du minuscule ciron au mythique phénix, et l’empreinte parfois déterminante qu’elles ont pu avoir sur leurs écrits. Nourri d’anecdotes délectables, cet inventaire imagé de créatures mythiques ou bien réelles atteste que les plus belles pages de la littérature renferment, comme un herbier des « feuilles remisées entre deux feuilles », l’histoire d’une humanité indissociable de son environnement, entourée de bêtes et de plantes qui peuplent son imaginaire.