Sur les rails de la vie
Surtout connue pour sa poésie, Sylvia Plath a aussi écrit des nouvelles dont certaines étaient encore inédites en France, comme ce court récit, sombre et profond, qui nous embarque à bord d’un mystérieux train.
En imprimerie, la nonpareille désignait le plus petit des caractères, désormais appelé « corps 6 ». En le choisissant pour nommer une collection consacrée à la parution de nouvelles inédites, les éditions de La Table Ronde réhabilitent ce terme désuet mais non moins poétique, en parfaite adéquation avec la rareté des textes publiés. Après avoir fait paraître ses Carnets intimes et un beau livre regroupant des dessins de Sylvia Plath, la maison a choisi un récit jamais publié de la célèbre poétesse américaine, pour inaugurer une collection qui regroupera bientôt des textes courts de Richard Russo, Emma Cline, Eduardo Halfon, et bien d’autres. Qualifié par son auteure de « vague conte symbolique », Mary Ventura et le Neuvième Royaume est un texte étrange sur l’indépendance, l’entrée nécessaire dans la vie adulte, la possibilité d’une rédemption. Écrite en 1952, soit quelques mois avant la première tentative de suicide de l’auteure, alors étudiante au Smith College, la nouvelle fut proposée au magazine Mademoiselle – dont Sylvia Plath avait, peu avant, remporté le prix d’écriture –, qui la refusa. Le lecteur y accompagne la jeune Mary Ventura dans son voyage en train vers le « neuvième royaume » . Encouragée par ses parents à monter en voiture alors qu’elle ne se sent pas encore prête à les quitter, Mary relève, au fil de l’avancée du train, que son périple n’a rien d’ordinaire – de la résignation des passagers à la clameur des roues qui semblent marteler « ta faute, ta faute, ta faute ».